Article importé de Guts of Darkness, et du à Progmonster.
"Yank Crime" est peut-être encore plus décisif que ne l'était l'album éponyme de Drive Like Jehu. Mais avec le recul, s'envoyer les deux plaques d'affilée - les deux seules enregistrées avant que Froberg et Reis n'aillent rejoindre Rocket From The Crypt, eh oui ... - est une expérience musicale intense à partager de gré ou de force avec son voisinage, toutes fenêtres ouvertes, histoire de leur faire savoir qu'on existe, et qu'en dépit de tout ce qui peut bien arriver, en dépit de tout ce que l'on peut bien penser, on les emmerde tous, qu'on est là et bien là, qu'il faudra faire avec, ne leur en déplaise et que rien ni personne ne viendra nous en déloger. "Yank Crime", de par son énergie, a de quoi faire bomber le torse à n'importe quel être en manque de confiance en soi. Si vous faites partie de ceux pour qui le "Weight" d'Henry Rollins a joué un rôle capital, il ne saurait en être autrement de "Yank Crime" qui véhicule la même force, la même détermination. Une leçon de courage. Une leçon de bravoure. Un pamphlet qui torpillera dans l'instant le sentiment de résignation dans lequel le quotidien sordide tente de nous aspirer à tout instant.
Luxe suprême, la musique de Drive Like Jehu a plusieurs grilles de lecture ; on pourra s'y rendre pour aller y puiser les ressources nécessaires qui nous manquent, on l'aura compris, mais on pourrait tout aussi bien s'installer confortablement dans son fauteuil - sans pour autant parvenir à réprimer cette folle envie de dodeliner de la tête - et apprécier à sa juste valeur le spectacle qui nous est offert : une bataille rangée où chaque coup est porté à bon escient avec une précision redoutable, une efficacité remarquable, malgré ses constructions parfois alambiquées mais qui en font tout le charme et le vice ("Luau"). Le passage éclair de Drive Like Jehu dans le paysage alternatif américain aura comme souvent laissé des traces à titre posthume. Un groupe à redécouvrir d'urgence, dont le rôle est au moins aussi important que celui des Slint ou de Fugazi.
Un second disque peut être un peu plus Pixies dans l'âme... davantage de passages calmes et d'espace pour respirer.
- Parution : 1994
- Label : Interscope, Swami records
- Producteur : Drive Like Jehu
- Appréciation : Méritant
- Note : 7/10
- Qualités : intense
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