“…you can hear whatever you want to hear in it, in a way that’s personal to you.”

James Vincent MCMORROW

Qualités de la musique

soigné (81) intense (77) groovy (71) Doux-amer (61) ludique (60) poignant (60) envoûtant (59) entraînant (55) original (53) élégant (50) communicatif (49) audacieux (48) lyrique (48) onirique (48) sombre (48) pénétrant (47) sensible (47) apaisé (46) lucide (44) attachant (43) hypnotique (43) vintage (43) engagé (38) Romantique (31) intemporel (31) Expérimental (30) frais (30) intimiste (30) efficace (29) orchestral (29) rugueux (29) spontané (29) contemplatif (26) fait main (26) varié (25) nocturne (24) extravagant (23) funky (23) puissant (22) sensuel (18) inquiétant (17) lourd (16) heureux (11) Ambigu (10) épique (10) culte (8) naturel (5)

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Trip Tips - Fanzine musical !

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mercredi 15 mars 2017

DA CAPO - Oh My Lady (2017)





OO
lyrique, sensible, lucide
Pop rock, jazz

Déroutant au début, tant il n'est pas ancré dans un endroit bien cerné, mais vole au contraire vers de vagues étendues, par touches enfiévrées. La tension, le magnétisme d'une guitare acoustique sont retranscrites et amplifiées, prenant au départ un essor à l'exaltation académique, puis les amarres lâchent, guidées au son d'une voix nuancée dans la lignée de celle de Conor O'Brien (Villagers). Les amarres, c'est parfaitement en phase avec le sentiment de transit du refrain, We have been waiting here for too long. Il y à la fois la tension statique, contenue dans un orage de saxophone et de trompette, et le mouvement nébuleux d'aspirations aériennes. Puis une guitare espagnole. 

Da Capo semble rechercher la voie charnelle en même tant que l'élan vers les choses diffuses. Le chanson titre offre un virement surprenant, nous place dans une situation plus délicate, tourne un sentiment tragique en instants qu'il faudrait saisir en funambule. On pensera plus loin au funambulisme de Robert Wyatt. A. Paugam pousse ses contemplations vers l'insolite. Le refrain, rassemble les fractions éparses dans une mélodie bizarre et réussie. 

L'évocation de l’Espagne est de retour, comme le thème d'un voyage abstrait, avec You Really Don't Know. Voyage fait de ressentis et progressant par vibrations sourdes, dont la fraction évidente est dans la veine pop folk classieuse. Les chœurs rappellent l'album A Church That Fits Your Needs, de Lost in the Trees, un trésor américain que je conseille chaleureusement aux français de Da Capo. Il y a la même propension à faire pénétrer les chansons en territoire païen mais sacré. 

On pense à Villagers surtout sur le plus enlevé I Fell in Love, A. Paugam joue du timbre de sa voix à gorge déployée, c'est un instrument dont il restitue toute l'émotion et le désarroi. On l'imagine, les yeux fermés, se rendant à la note juste, la tête inclinée, les coins de la bouche relevés, figés un instant en une expression de dévotion et de félicité. 

Dès lors, on se laisse amener au gré des arrangements, par exemple sur la très intense Heal Me, qui assoit l'élégance et la verve jazz de Da Capo. On a l'habitude, dans la pop, de cuivres ; mais ici, rejoints par d'autres sonorités, ils vont plus loin, consument l'énergie, absorbent notre rythme de marche et nous laissent flotter pour atteindre des lieux idéels.


https://dacapo1.bandcamp.com/album/oh-my-lady

dimanche 7 février 2016

BETH ORTON - Daybreaker (2002)








OO
hypnotique, lyrique, doux-amer
Folk, indie folk


La timidité de Beth Orton, britannique du Norfolk, est marquante en concert. Mais la façon dont elle la dissimule sur ses albums, et en particulier dans celui-ci, n'est pas anodine non plus. L'écouter, c'est comme exhumer un chapitre déjà lointain de la carrière d'une artiste alors parvenue à sa pleine maturité, et qui n'a, malgré la vie, pas tant changé depuis lors. Elle a alors déjà écrit trois albums, et Daybreaker est accueilli sans excitation par la critique. Il est facile de voir pourquoi. La contribution des Chemical Brothers (Daybreaker, Mount Washington) donne un aspect électronique malvenu quand la fraîcheur acoustique sied tellement mieux, à une chanteuse immortalisée par sa façon terriblement émotive de s'accompagner à la guitare, les doigts ancrés, rigides. Les participations de Ryan Adams ou Emmilou Harris ne sont pas impressionnantes, même si elles débordent de professionnalisme.  Daybreaker se veut, peut-être trop, un album adulte.

Pourtant, l'album prend sa dimension 'Ortonesque' sur Carmela, un morceau que l'on aimerait dire 'à l'ancienne' même si on sait qu'il préfigura son chef d'oeuvre paru 10 ans plus tard, Sugaring Season. Elle y  capacité à basculer dans un versant bucolique enchanteur. La chose est vraie aussi sur This One's Gonna Bruise, délicatement soulignée par le picking appris de Bert Jansh, dans la plus pure tradition folk. Matiné de violoncelle, c'est le contrepoint le plus attendu de l'album. On est revenu là en premier lieu pour le timbre particulier de Beth Orton, l'intensité de cette voix à l'élasticité magique. 

Mieux, Daybreaker est un album sombre comme il faut, Ted Waltz, si fluide et limpide, pour maudire le soleil et le ciel 'vicieux'. Traditionnellement, ce n'est pas avant le dernier morceau, et sans s'éloigner de la rythmique bossa nova qui parcourt tout l'album, l'optimisme remplacer l'appréhension. Beth Orton suscite une sensation physique chez l'auditeur attentif, celle d’éclaircir le ciel, de repousser les nuages. Elle est pilote et la musique est son jet. Daybreaker, n'est-ce pas cette sensation de percer à travers les nuages? Le terme anglais, tant qu'on ne le traduit pas est plein de possibilités. Beth Orton nous embarquait et nous promettait d'y croire. Sugaring Season a été l’atterrissage, évoquant les choses de la terre. Pendant l'intervalle, elle nous a fait rêver comme des enfants, et continuera encore, on l'espère. 

D'ailleurs, son album suivant s'emparera de cette image en faisant figurer un arc-en-ciel sur la pochette de Comfort Of Strangers. Les grooves, les cordes, la basse électrique gonflée tracent des lignes qui propulsent Beth Orton hors de son orbite, pour nous donner de beaux refrains tels que sur Anywhere, chanson bossa-nova que l'on croirait produite à Chicago, avec un big band en bordure. Rien ne parvient à terrasser cette voix au moment où elle cherche le plus à s'affirmer. Paris Train est une autre réussite, avec ce piano porteur de mouvement, quelques notes entêtantes. L'orchestration, avec cornet lointain et voix pleine d'écho, est enivrante comme un premier voyage. 

Il est certain qu'elle a voulu en faire un album plus gros, capitalisant sur les promesses distillées par les deux premiers, quitte à développer un art de la dissimulation, qui scintille de mille feux à la fin de Mount Washington. Cette chanson de plus de six minutes a beaucoup fait finalement, pour présenter l'humeur sombre de l'album. 

jeudi 28 mai 2015

OTHER LIVES - Rituals (2015)





OO
élégant, soigné, 
Indie folk, orchestral

L’attente accumulée pendant les quatre années qui ont suivi Tamer Animals semble avoir déboussolé les amateurs du groupe, qui s’attendaient peut-être à ce que la tension cinématique de cet album suscite un grand mouvement passant les codes et les mythologies de l’Amérique rurale au filtre d’une élégance éperdue. S’il y a une confirmation, c’est qu’Other Lives persistent dans l'élégance éperdue' et endossent l‘autre facette de l’homme , animal 'le mieux dressé' qui est de se laisser entraîner, dériver, divaguer. Ce n’est presque pas une surprise, si, prêtant une oreille distraite à ce disque, il est si déroutant, sans début ni fin.

En comparaison, Tamer Animals (et son single hanté par l’ambition d’un personnage de cinéma, For 12), était limpide dans son Americana, évoquant un western existentialiste. L’album marquait la nécessité de choisir son camp, du point de vue musical et émotionnel. L’indie folk ne contient chez Other Lives qu’un fil ténu de séduction et d’humour, remplacés par une pleine mélancolie et une résignation passant par toutes les teintes de l’ocre jaune du désert aux sépia de la poussière. Cet album-là, dû à un quintet, décrivait leur vie dans l’Oklahoma. Le groupe a déménagé, emporté leur talents multi-instrumentistes et leurs passions pour des musiques non ‘populaires’ – leur charme autant que leur malédiction - avec eux. Pour ce désormais trio, l’essentiel était de rester centrés sur leur identité naturelle, définie par le mouvement, l’ailleurs, l’homme en lui-même et confronté au grand dehors.

« I could never decide » chante Jesse Tabish sur Beat Primal, une de ces mélopées explorant les multiples facettes de l’Homme, comme dans une tentative de figer l’indicible condition en une sculpture sonore de trois minutes et demie. Trois minutes et demie dans un album de près d’une heure, et cette question : combien de temps, cette fois, le groupe a-t-il pris pour choisir quelle musique enregistrer, et comment superposer les strates si nombreuses qui sont leur façon de faire – chaque chanson contenant par exemple entre 20 et 30 trames de percussions différentes ? Le groupe tient son talent de la volonté d’utiliser les sons comme des couleurs. C’est une contrainte qui peut donner des résultats illimités. Décrivant ce nouvel album, Jesse Tabish l’a qualifié  de vaste, étrange et multicolore – juste à l’image de la pochette, tout semble propulsé à partir de couleurs primaires se mélangeant en de longues traînées irisées. Dans une prouesse sous-estimée, ils plient une narration grandiose en une transe d’ethnologie lyrique.


Il ne faut pas trop se laisser happer par les profondeurs vertigineuses auxquelles nous convient le groupe et les douze musiciens invités à apporter des arrangements gracieux à l’album. Chaque chanson pourrait être définie par ce qu’elle tente de produire chez l’auditeur, et ce qu’elle provoque vraiment. Fair Weather et Pattern ne semblent qu’un avant-goût, puis vient la déclaration d’intention, Reconfiguration, qui dans sa vidéo sublime le thème du duel - ou de la dualité. New Fog et 2 Pyramids, au cœur de l’album, sont à chaque écoute une source d’émerveillement ; English Summer et ses arpèges précieux rayonnent, puis For the Last et ces notes évoquant celles de l’homme à l’harmonica dans Il était une Fois dans l’Ouest donne une dimension presque grandiloquente à cette beauté. S’il fallait ne retenir qu’une seul repère, on peut se saisir de l’affirmation de Tabish que nous sommes des ‘créatures de rituel’ sur la chanson-titre à la fin, une réflexion complémentaire à l’observation que nous ne sommes que les ‘animaux les mieux dressés’ sur le précédent album.  Quelques repères de plus seront nécessaires pour pleinement profiter de cette œuvre foisonnante, montrant un groupe à l’encontre des tendances, qui se laisse porter par sa propre maestria.  

jeudi 21 mai 2015

FIELD REPORT - Marigolden (2014)




OO
élégant, lyrique, doux-amer
indie folk, songwriter

La musique de Field Report est tout de suite très américaine. La pedal steel, emblématique du far west, de Marigolden a été enregistrée par Ben Lester dans un studio qui s’appelle le Unicor Ranch, le ‘ranch de la licorne’, si on en doutait. C’est une Amérique parfois spécifique, mais pas géographiquement délimitée.

Sur ce disque qui a nécessité 10 mois de travail, la scène la plus horrible de l’album survient lorsque le fils du sheriff, dont Christopher Porterfield  souffrait la méchanceté quand il était jeune, se suicide en se tirant une balle sur un green de golf. Il y a toujours cet avertissement presque grinçant de ce que peut donner la vanité de pire. Ce sont des situations de film policier données à la contemplation.  Ce chanteur-là, que l’exigence lyrique place dans les fleurons de l’indie folk américain, nous faits parfois penser à John Grant, par sa façon aussi de suggérer qu’il n’a pas la moindre valeur tout en s’en donnant une finalement, morale, triomphante. Sauf que les grands coups de synthétiseurs de Pale Green Ghosts (2013) de ce dernier sont tenus ici par des touches bien plus aériennes. La comparaison tient puisque John Grant est signé aux Etats Unis sur Partisan Records, le même label que Field Report.


Hormis que tout le groupe a changé depuis le premier album éponyme (2012) qui était comme le grand saut que Porterfield s’autorisait enfin, après toutes ces années d’attente, dans la poésie et l‘âme humaine, Marigolden sonne quasi pareil que son prédécesseur. Les innovations électroniques ont été contenues dans un faux minimalisme, assez vaste et détaillé, à l’image de Wings, la première chanson de la deuxième face – puisque l’album est clairement structuré en side a/side b. C’est le producteur de Feist aux manettes. Wings, c’est l’un de ces moments où la musique devient aussi propre à Porterfield que les paroles, qui décrivent le chanteur en Icare moderne. « Soaring close to god until his love melts my wings and the emptiness of space smells like parafin and gasoline… » La chanson-titre a le dénuement et la touche d’Americana suffisante pour entrer dans les clichés du Nebraska. Les paroles sont, comme toujours, ce qui retourne le monde et semble nous le présenter dans le bon sens pour la première fois. Les synthétiseurs qui sont devenus la marque de fabrique de Field Report nous entrainent dans un flottement jusqu’à Michelle, une chanson encore plus ambitieuse, bâtie autour de quatre couplets qui ne laissent inexploré aucun recoin de la psyché. Porterfield est dans un élan qui produirait des tragédies quasi antiques s’il transposait son sens narratif au cinéma. Mais pour rester en termes musicaux, c’est comme si un Neil Young affecté version Tonight’s the Night chantait dans les ambiances de Harvest Moon.  C’est une poésie si concrète, presque agressive, qui se révèle après plusieurs écoutes, quand les moments apparemment moins valeureux deviennent terriblement attachants au-delà de leur seule élégance. Summons tient une note d’espoir et montre une tenue qui gravite autour de la résilience. « If you fall in love again while i’ve been away… » L’album, superbement construit, commençait, ou presque, par  “Le corps se souvient de ce que l‘esprit a l’oublié” pour se terminer, ou presque, par le retour à la maison d’un homme, qui, s’il n’est pas complètement palpable, est moins malade qu’il aurait pu l’être. 

FIELD REPORT - S./T. (2012)





OO
élégant, doux-amer, lyrique
Indie folk, songwriter

Chronique écrite dan le cadre d'un article à paraître dans Trip Tips 26. 

Il y a des gens dans la vie qui sont plus doués pour explorer les failles humaines, les fragilités, que pour vendre des appartements, travailler dans un commerce ou dans une société quelconque. Par humilité, ils décident d’étudier ce qu’ils connaissent le mieux : leur propre cas. Mais avec une petite astuce : quand tu vas t’adresser à eux, ils te parleront à la deuxième personne, comme si tout ce qu’ils ont traversé était applicable à toi. C’est le moyen qu’ils ont trouvé pour se vendre.

Christopher Porterfield s’attache à croire, et à nous persuader, que ce qu’il chante, c’est ce qu’éprouvent beaucoup d’hommes autour de lui, qui peuvent ainsi se reconnaître dans sa musique. Si c’est le cas, un artiste est vraiment aussi important qu’un médecin, et la musique remplace les médicaments pour arrêter de boire, ou ce genre de trucs. Il n’y a rien de maniéré chez Porterfield, mais c’est pourtant un gentleman. Un rejeton issu du même moule que Justin Vernon de Bon Iver ou Phil Cook de Megafaun, deux artistes indie folk qui ont remporté un grand succès depuis le milieu des années 2000, tandis que Porterfield continuait de jouer dans des endroits petits et vides et de faire les premières parties de ses acolytes. La différence de poids, (un poids sur le cœur, mélancolique), c’est que Porterfield mais l’accent sur les mots, sur la confidence plutôt que sur la musique. Il ne ressemble pas aux plus ornementé des groupes indie-folk : d’ailleurs, son ‘groupe’ change entièrement entre ce premier album et le suivant, Marigold (2014) qui réinvente le mythe d’Icare Californien comme Bill Callahan a réinventé le rider texan (Porterfield ne cache pas que son album favori entre tous, c’est A River Ain’t Too Much to Love (2005)).

C’est une musique très américaine, et pourtant, c’est cela d’une homme dans le dénuement de la marche plutôt que de celui qui fait des distances à cheval. Porterfield a pris sa vie en main à trente ans passés, saisissant selon lui le fait que le moment était arrivé de ‘sauter dans le train’, et il trouve immédiatement un équilibre exemplaire entre ce qui est personnel, ce à quoi on peut s’identifier, en tant qu’auditeur et rêveur, ce qui est général, et ce qui est précis, comme le souvenir de ce qui s’est passé la semaine dernière, mais transformé chose élégiaque. Pour le reste, le simple fait d’avoir fait de son projet l’anagramme de son propre nom en dit long. Il y a un peu de l’humour noir, aussi, de Bill Callahan, un artiste auquel Porterfield mérite vraiment d’être comparé, et c’est rare. Ses chansons sont faites pour vous mettre un peu mal à l’aise, mais la brillance mélodique qui vous gagne sur Intercommunicado ou Circle drive, au cœur de l’album, finit par vous conduire dans les endroits où vous avez toujours rêvé d’être. Là, dans son aspect le plus émotionnel (‘Someday we do the best we can’), il arrive qu’on pense aussi à Conor Oberst. Je ne sais pas pour ce dernier, mais Porterfield doit encore écluser une jeunesse complexe et en partie gâchée par la boisson et la solitude qui en découle.

Cette musique prend une dimension cinématographique sur Chico the American. Il décrit des psychés déphasées par la célébrité, plaque les avec une profonde assurance la poésie humaniste sur le surréalisme d’un rêve, jusqu’à évoquer plus largement tous ceux qui sont morts trop jeunes. L’un de ses héros, Jason Molina, en fait partie. Les instruments sonnent jusqu’à la fin dans une isolation quasi spectrale. La partie de synthétiseur qui parcourt tout l’album devient peu à peu inestimable. 

samedi 16 mai 2015

EFTERKLANG - Piramida (2012)




chronique écrite dans le cadre d'un article à paraître dans Trip Tips 26.


OO
soigné, lyrique, onirique
Pop, Indie folk, orchestral


Ceux qui cherchent dans les manifestations de mélancolie de grand mouvements, et des tournures originales, devraient écouter Efterklang, qui le font d'une façon assez détachée pour rappeler des parangons de la musique électronique comme Matthew Dear, jamais Sigur Ros et rarement Bon Iver. Il m'es arrivé de songer, comme modèle du chanteur Casper Clausen, à Mark Hollis, du groupe pop Talk Talk, à sa manière un peu détachée et froide. Une chose qui frape en voyant Caser Clausen en concert, c'est son allure de grand échalas, résolument penché au-dessus de ce qu'il chante. A ce point de la progression du groupe, critiquer la façon de chanter de Clausen – particulièrement peu démonstrative – revient à tenter inutilement de causer une mutinerie sur un navire en critiquant son capitaine. Plusieurs membres d'Efterklang ont d'ailleurs déjà quitté le navire, pour que le groupe se retrouve désormais sous a forme d'un trio - souvent bien entouré (Nils Frahm au piano, Peter Broderick au violon...). Il ont raté les retrouvailles de Clausen avec la mélodie vocale, ici, sur Between the Walls surtout.
La richesse de cet album se mesure en termes conceptuels et musicaux. Musicalement, c'est une profondeur sans exubérance, basée sur la qualité de sons (sur la finale Monuments par exemple). Et que penser de la façon dont le concept - isolement dans une ville fantôme - se transforme en méditations lyriques affectées ? Leur nouvelle marque de fabrique, en comparaison avec Parades (2007) et même Magic Chairs (2010), est une force minimaliste basée sur une rigueur un peu triste.
Told to Be Fine démarre dans le feu de cette ferraille frappée, transformée en percussions hétéroclites comme celles des premières nations, figurant un travail à l'unisson, les musiciens faisait désormais office de mineurs à la place de ceux qui ont quitté Piramida, la ville polaire slave, depuis longtemps. Ces marimbas improvisés produisent des sons réticents à se mélanger, enfermés chacun dans leur propre résonance – ils produisent une forme de vide et de beauté dont on ne prend la mesure qu'au fil des écoutes. Told to be Fine se termine par des chœurs, non pas ceux d'une chorale de 70 femmes, cette fois, mais du trio, qui répètent « Told you it's ok/keep me away » « Je t'ai dit que ça irait/de me laisser à l'écart. » Au final, la chanson ne laisse pas une impression très physique, mais plutôt celle d'émotions lointaines renfermées, de lieux sacrés que la lumière de cette musique pop moderne dénature. Les méditations de Clausen, ses refrains répétés discrètement, sont autant de moments emblématiques du disque dans ce qu'il contient de détachement. C'est dans l'écart entre ce qu'on entend et ce qu'on verra, une fois le groupe sur scène, que réside aussi l'intérêt d'Efterklang, un groupe capable de se réchauffer au fur et à mesure que des musiciens de talent se mettent à jouer, au fur et à mesure que le public joue à se perdre dans leur mélancolie sophistiquée.

vendredi 15 mai 2015

BEN HOWARD - I Forget Where We Were (2014)



OO

sensible, pénétrant, sombre
indie folk

En musique, le sentiment de mélancolie suscite bien plus un plaisir agréable, comme celui qu'on peut éprouver tandis que le soleil se couche et nous éclaire sereinement à travers les branches agitées d'un arbre, que d'une sensation de désespoir. L'attitude en retrait d'un artiste qui enregistre ce genre de musique n'a souvent rien à voir avec la générosité qu'il produit. Ben Howard, raide et sombre sur la pochette de son deuxième album, ne laisse pas imaginer toute la grâce virevoltante qu'il met par moment dans ses chansons, et jamais mieux qu'au milieu de la chanson titre. Les roulements de batterie nous emportent loin.

La mélancolie est aussi un sentiment particulièrement pur, dans cet album excellent ou tout sonne si juste, que l'influence du folk et de la musique ambient des seventies de John Martin saisit dans toute sa vérité intemporelle. Dès lors, ceux qui regretteront l'apparente létargie qui s'installe peu à peu dans l'album, en comparaison avec le folk plus heureux de Every Kingdom, rangeront bien vite lers regrets au placard. Howard expérimente ici avec les harmonies, crée un son vaste et original, qui retranscrit un saut dans l'inconnu. Au est précipités par la grand porte, dès Small Things, qui répète de façon frappante 'His the world gone mad, or is it me/All the small things that gather around me, gather around me...' On peut vraiment ressentir avec lui les forces contradictoires qui l'encerclent, dans un sentiment de solitude face aux éléments qui a tôt fait de donner à l'album un côté américain.

La gravité du jeune Howard ont incité à la comparaison avec Justin Vernon, par exemple, au moment où Every Kingdom remportait des prix et se vendait en grosses quantités. La voix de Ben Howard n'a sans doute rien d'extraordinaire, au delà de la belle lassitude qu'elle exprime. Il ne fait pas penser, comme son héros, du folk sur Solid Air (1973), au folk-soul transcendant de Terry Calier, même sa sensibilité exacerbée lui donne un charme particulier. Il s'assure que la production de son album bâtisse sur le folk du passé des canevas qui s'étirent et se transforment en prenant leur temps (Time is Dancing, End of the Affair) La première des deux est envoûtante, la seconde prouve que I Forget Where we Were est un album d'ambiances, capable de prendre son envol sous l'arbre agité au crépuscule comme dans la nef d'une cathédrale. On pense à Again, la chanson d'Archive, surtout lorsque Howard s'époumone directement dans le corps de sa guitare.

Dans cet enchaînement construit , chaque chanson semble apporter ce qu'il manquait à la précédente, la complétant qu'il est facile d'oublier où elles commencent et se terminent, se déroulant comme dans un fondu enchaîné. On retient en particulier comment la guitare acoustique réapparaît sur In Dreams, une C'est l'intelligence de cet univers dans lequel plonge la musique de Howard qui donne par contraste, à sa voix un aspect hanté. On pense à A. A. Bondy un autre merveilleux esthète de la mélancolie en forme de voyage. Si on en doute, pour le voyage, il suffit d'écouter Conrad. On ne décroche pas d'un tel album !

lundi 11 mai 2015

DRY THE RIVER - Shallow Bed (2012)




O
efficace, lyrique, 
rock alternatif, indie folk

Texte provisoire  extrait de l'article à venir dans Trip Tips 26.


La voix de Peter Liddle, le chanteur de ce groupe, évoque par ses trémolos des chanteurs folk tels que Paul Simon et Art Garfunkel, que sa mère lui faisait écouter petit. Les harmonies chantées avec le guitariste Matthew Taylor et le bassiste Scott Miller, les arrangements riches, parfois pompeux, les structures ambitieuses, en tensions mélancoliques, de leurs chansons en font un groupe rafraîchissant à aligner aux côtés des pourtant moins fougueux Other Lives. Rapprochement intangible peut-être, mais pour un article rassemblant six artistes/groupes, et après en avoir écouté beaucoup d'autres, je me permets cet écart intercontinental.
C'est la vidéo d'un concert à Brighton, où le groupe mélangeait les morceaux de ses deux albums, qui m'a révélé aux subtilités d'un groupe capable si malignement de s'exporter. Car comme le décrivaient Britich Sea Power (pressenti pour figurer aussi aux côtés d'Other Lives), dans l'album The Decline of British Sea Power, le déclin de la nation britannique est irrémédiable, et pour les groupes de ce pays, c'est essentiel de pouvoir créer du lien au-delà des océans. La morale, la science (humaine) et la religion sont ici creusées par des paroles paradoxalement complexes que des fleuves de cordes tentent un peu trop vainement de faire passer bien qu'une grande majorité du public du groupe (qui ont troqué Mumford and Sons pour celui-ci) ne cherchera pas à comprendre. Dry the River attire sur lui les avanies et les peines du monde alternatif et interchangeable du rock d’aujourd’hui : beaucoup de gens les considéreront avec suspicion, n'entendant plus, sur un album construit autour de refrains et moments fédérateurs, la transmission de foi du groupe et son attitude de recherche.
Ils avaient trouvé, avec Shallow Bed, un producteur américain capable, mais Dry The River méritent dans le futur d'être poussés dans de nouvelles voies avec leur musique. Comme les meilleurs groupes, leur identité vient de ce que chaque musicien écoute et apprécie des genres musicaux différents, jusqu'à la country pour l'un des guitaristes. Constitué de chansons jouées depuis les débuts du groupe en concert, Shallow Bed fait désormais la cartographie de leurs débuts. Il y a les chansons écrites à 15 ans par Liddle, telle Weight & Mesures, qui avec trois accords et, en sa qualité de relecture post-adolescente, se consume pour créer un formidable pont avec la culture folk. Elle est, d'ailleurs, le mieux reçue lors des concerts aux Etats-Unis. Il y a aussi l'accueil déconcertant d'enthousiasme des fans réservé à No Rest, une chanson qui concentre e paradoxe, la bipolarité du groupe entre des paroles d'abord complexes. Et puis, juste après avoir hésité un peu sur une dernière contemplation, 'Our hearts are a herd', elle débouche sur un refrain si facile à scander, dont le climax est atteint sur le pourtant beaucoup moins excitant 'Did you see the light in my heart?

samedi 9 mai 2015

LORD HURON - Lonesome Dreams (2013)





O
vintage, romantique
Indie folk, americana

Chronique écrite dans le cadre d'un article pour Trip Tips 26

Sur cet album, Time to Run profite d'une coda où le rythme d'un train répond à des choeurs lointains. Lord Huron est un groupe ancré dans le passé, dans un monde la communication passait par le télégraphe et les relations amoureuses revenaient à scander son amour impossible face à la vallée. Heureusement, Lord Huron fait en sorte de rendre chaque couplet entraînant, chantant dans un tempo soutenu. On pense parfois à la pop d'un autre monde telle que l'a imaginée Animal Collective. La simplicité initiale de Lord Huron les apparentent sur Lonesome Dreams à des répliques moins fabuleuses des Fleet Foxes, comme eux perdus dans le temps. C'est dû au fait que le parolier Ben Schneider, comme Robin Pecknold, est du type à poursuivre des obsessions naturalistes. Si aucune autre inspiration équivalente à cette contemplation maniaque et tétanisante ne vient la recouper, la vapeur que le groupe dégage à couvrir ces distances finira par faire détraquer la locomotive, et le groupe s’essoufflera. Mais comparer le groupe aux Fleet Foxes dont ils se rapprochent beaucoup – harmonies, structures des chansons – ne doit pas servir des critique, les Fleet Foxes étant d'ailleurs suspendus depuis l'existence de Lord Huron dans un lieu incertain, et leur musique n'était désormais plus qu'un lointain souvenir de ce qui a pu fonctionner. Pourtant, la légèreté d'une chanson comme The Man Who Lives Forever avec des percussions et tonalités exotiques, fait renouer le groupe avec un style de pop plus affirmé. Tout en faisant inexorablement progresser la thématique temporelle de l'album. On pense aux sonorités fantaisistes de Memory Tapes. Lullaby continue dans un ambiance plus insulaire encore apportant avec son marimba la preuve que la frontière mexicaine a été largement traversée, jusqu'en Amérique du sud. C'est le cas de toute la deuxième parie de l'album, séquencé comme un voyage, si bien que les textes finissent par apparaître ce qu'ils sont sans doute : un prétexte à embarquer.  
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