Parution : novembre 2009
Label : Warner Bros
Genre : Folk
A écouter : Baby, Rats, First song for B
6.25/10
Qualités : original, varié
Sur Golden Apples of the Sun (2004), Devendra Banhart documentait tout un pan de culture folk américaine en considérant les différents artistes qui y pointaient le bout de son nez comme ses amis. Ce n’était pas une opération commerciale mais une joyeuse invite à produire ensemble. Cet élément de famille a toujours une place importante dans le cœur de Banhart, en témoignage ce livre intitulé Family qui met en lumière la faune de cette fameuse scène « freak folk » vieille d’à peine 10 ans. Depuis, la famille s’est agrandie, mais Devendra Banhart, étrange créatures entre toutes, reste une icône que des critiques peu enthousiastes (sur ce nouveau disque) ne peuvent entamer. C’est à la même époque que Banhart sortait Rejoicing the Hands (2004), le pas décisif vers cette forme de alt-célébrité qu’il est à même d’apprécier maintenant à la manière dont les médias s’intéressent à lui.
Banhart est plutôt extraverti pour son genre. Il a maintenant l’habitude de surfer sur la vague de reconnaissance qui s’attache à lui, et ce n’est pas sa signature récente avec la major Warner Bros qui dira le contraire. Il est devenu un genre de star un peu étrange, qui refuse encore de se prendre au sérieux. Sa voix, seule, est devenue peut être un peu plus conventionelle avec le temps, Banhart exploitant maintenant au mieux les qualités de son timbre.
Les facettes différentes de la musique de Banhart se côtoient parfois sur le même titre ; c’est le cas sur Angelica, qui oscille entre chanson folk et samba, pour un résultat tout à fait personnel.
Ses détracteurs remarquent souvent que ses chansons installent une ambiance sans aller nulle part ; que ce sont seulement des fantaisies, voire des coquetteries – d’aucuns s’agacent de l’entendre chanter en espagnol. Son septième album en sept ans, What we Will be, ne les fera pas changer d’avis. Disque plein de bribes, de ce qui peut ressembler à des essais pour bien faire, Banhart ne se fixe presque jamais. En résulte l’impression d’un résultat inabouti, mais charmant.
First/Last Song for B distille une mélancolie un peu surprenante pour celui qui nous a habitués à un optimisme vivifiant. 16th and Valencia Roxy Music est bien plus étonnant encore, évoquant le prog-rock de Franz Ferdinand, un son propre ou chaque élément est soudain à sa place. Banhart cherche de nouvelles formes de concision. Rats est lente, psychédélique, progressive, c’est l’un des meilleurs titres du disque. Banhart clôt le titre en toussant dans son micro et en disant simplement « rats ». Terrible. Maria Lionza, pièce de presque six minutes, est agréablement habitée, et s’en tire comme une sorte de jam-session aérienne et jazzy. Un autre morceau de bravoure est le Foolin’ final, reggae doux et amical.
Les paroles sont marquées par l’enfance, la jeunesse, l’innocence, qu’il fait rejaillir chaque fois avec une once de complaisance – mais c’est parce qu’il croit intimement que c’est le rôle de sa musique que de lui faire explorer les aspects les plus doux et mélancoliques de sa propre personnalité ou des personnes qui l’entoure. On imagine que les registres temporels, le passé particulièrement, ont une importance capitale dans sa gymnastique.
L'écriture a évolué depuis Cripple Crow ; les facettes différentes de la musique de Banhart se côtoient parfois sur le même titre ; c’est le cas sur Angelica, qui oscille entre chanson folk et samba, pour un résultat tout à fait personnel.
Ce qui différencie Devandra Banhart des autres compositeurs des Appalaches, c’est qu’il parvient à avoir une vue globale de son art. C’est son regard distancé qui donne l’impression qu’il se joue de lui-même ; pourtant, il conjure avec talent des éléments folkloriques divers, comme s’il assemblait les pièces d’un costume. Banhart fait de la musique pour se relaxer ; lorsqu’il deviendra plus sérieux, il signera un chef d’œuvre.
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