The Green Man est le plus récent disque (hors compilations et rééditions) de Roy Harper, le songwriter anglais d’ores et déjà aux côtés des grands noms Jimmy Page à Bert Jansch, dans la page du son folk-rock, s’il en existe une. Cet album presque complètement acoustique est voulu comme un retour aux sources de sa musique, c'est-à-dire à la fin des années 60. « Je sentais que je voulais revenir à mes racines. J’ai décidé de ne pas avoir de basse et de batterie pour cette raison. J’avais besoin de me rapprocher de mon véritable cœur musical ». Harper s’en est bien éloigné dans les années 80, avec plusieurs disques indignes de sa sensibilité ; mais ses divagations ne l’on pas ammoindri dans ce qu’il a d’attachant et de sensible. Vieil enfant perdu dans le temps et l’espace, au cœur d’un monde qui lui appartient – il publie ses disques sur son propre label, Science Friction – sa discographie peut être perçue comme un cheminement, une exploration parfois harassante pour lui (à l’époque de Stormcock (1971), de Lifemask(1973)), dont The Green Man est la suite naturelle.
Le plus frappant ici est sa façon de s’inspirer du son de Bert Jansch et de Nick Drake, sur des titres comme le somptueux Wishing Well ou Rushing Camelot. La guitare de Harper, son jeu qui n’est jamais meilleur que lorsqu’il rappelle Stormcock, ce balancement unique, rêche, cette saccade. On peut penser que ce style particulier a inspiré Gilmour sur Animals (1977), après que Harper ait prété sa voix sur Have a Cigar. Cette particularité musicale contrebalance à merveille le jeu rond de Jansch. Les deux langages sont utilisés à part égale sous les doigts de Harper, selon les titres. Il est accompagné de Jeff Martin, qui joue divers instruments sur huit des onze morceaux.
L’ombre de Drake n’est jamais bien loin, et avec elle l’âme d’un folk anglais pastoral, introverti, timide mais puissant. Harper ne veut pas, ou plus, s’incarner complètement dans un rôle, il ne veut plus depuis longtemps appartenir à une classe ; il déambule comme un nuage du folklore ; la photo de pochette est une référence à une figure mythique d’europe de l’est, un visage fait de feuilles (ici les traits de Harper lui-même) , gravé dans la pierre ou le bois et dessiné dans les églises. Le rendu est assez pauvre et l'on peut penser à une incitation à la consommation de drogues. Malgré son maquillage, Harper est reconnaissable pourtant dans tout ce que The Green Man contient comme accroche au réel. Le titre The Monster fait écho à des albums engagés sur le plan politique, Flat, Baroque and Berserk (1970) ou Stormcock. New England est une chanson mélancolique, que seul un anglais « du passé » pouvait rendre aussi bien. Sexy Woman poursuit l’exploration d’une naïveté défraîchie et attachante.
L’album semble se doter d’un côté mystique dans sa deuxième moitié, à partir de Glasto et ses accents nostalgiques. The Monster continue dans cette veine magique, un peu ténébreuse. Le mouvement, la dynamique insdispensable aux disque de Harper sont bien présents, et font de The Green Man, placé sous tant de sagesse, paut-être l’un de ses meilleurs opus. L’un des plus équilibrés.
Parution : 2000
Label : Science Friction
Producteur : Roy Harper
Genre : Folk-Rock
A écouter : Wishing Well, The Monster, Sexy Woman
Appréciation : Méritant
Note : 7.75/10
Qualités : attachant, engagé, sensible
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