Traduction de la chronique de Pitchfork.
Lorsque Yeasayer ont débuté en 2007 avec All Hour Cymbals, ils étaient un groupe art-pop de Brooklyn étrangement en décalage avec leurs pairs. Ils ont laissé planer le mystère et la surprise, et dans leurs meilleurs moments (2080, Sunrise) ils ont réussi à faire du mysticisme amusant et de la musique pop un semble attrayant et passionnant. Ils étaient essentiellement une version roots et rock de MGMT à ce moment. Leur sort semblait doublement scellé par Tightrope, leur contribution diablement bien exécutée en live sur la compilation de charité Dark Was the Night.
Ensuite, on pourrait estimer qu'ils ont fait encore mieux avec Ambling Alp, le single qui précédait Odd Blood. Alp a réussi à conserver la bonne foi pitoresque originelle en la transformant en pop brillante, lustrée et accrocheuse. Cette dualité s'étendait aux paroles également ; la chanson évoque l'infame boxeur italien Primo Carnera, mais dans le refrain Chris Keating chante le genre de conseils paternels bienveillants que l'on pourrait entendre dans un montage de Shrek.
Comme Ambling Alp, Odd Blood devrait séduire un grand nombre de personnes : Yeasayer ont fait un disque potentiellement visionnaire en utilisant l'éventail complet des possibilités de la musique basée sur des logiciels informatiques pour créer ce qui aurait été à un moment donné du rock radio-friendly. L'élastique O.N.E et l'évocation à la Tears for Fears de I Remember sont de bons coups de sang style eighties, et confirment le potentiel préssenti sur All our Cymbals en rivalisant avec les meilleurs titres de ce disque. L'ouverture The Children marche aussi en adaptant leurs tendances décalées dans une chanson bien ficelée. Dans le plus gros de la première moitié de l'album, Yeasayer fait preuve d'un savoir-faire et d'un discernement rares dans la musique « indie » moderne. Leurs paroles ne veulent peut pas dire grand-chose, mais leurs dispositions agiles, leur sens de la dynamique et du rythme, et le chant expressif de Chris Keating transmettent une énergie.
Le reste de l'album souffre d'une crise d'identité majeure – peu des quelques idées dispersées prennent, et la plupart d'entre elles finissent trop cuites. Dans l'ensemble, le disque alterne entre une synth-pop années 80, du prog-rock anglais (sur les bonnes chansons) et une pop alternative qui imite la musique du monde (et ce sont les mauvais). Des chansons comme Rome ou Love Me Girl ont l'objectif d'un étalement ambitieux, mais s'essoufflent dans la boue, tandis que les ballades Strange Reunions et Grizelda semblent laborieuses et congestionnées.
Yeasayer ne va nulle part : des singles de qualité, des vidéos inventives, et de solides performances live, mais quoi d'autre ? Il est difficile de ne pas rendre compte de la pression du groupe au moment de ce second disque - c'est presque palpable dans leur production sursucrée et leur recherche désespérée d'une direction, et, par conséquent, Odd Blood est un peu trop plein de manque d'idées. Je suis retourné écouter Tightrope de nouveau. C'est charmant, humain, et assuré, mais ça gagne votre affection plutôt que votre respect. Lorsque Odd Blood réussit, c'est ce qu'il fait, mais quand il échoue, il n'arrive à rien.
- Parution : février 2010
- Label : Secretly Canadian
- Producteur : Yeasayer
- Genre : Pop
- A écouter : Ambling Alp, One
- Appréciation : Mitigé
- Note : 5.50/10
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