Traduit depuis Pitchfork.
"Est-ce protecteur pour les lâches pour faire ce qu'ils ont déjà fait? » C'est une question rhétorique, bien sûr, mais venant de la bouche de Stephen McBean, le sentiment est particulièrement souligné. Pour sa décennie passée à faire de la musique, McBean n’a jamais été du genre à revenir sur ses pas, s’aventurant hors du folk-rock de Jerk With a Bomb pour rejoindre la pop mercuriale de Pink Mountainhops et le boogie tremble-terre de son projet le plus réussi à ce jour, Black Mountain. Mais même la perception populaire de Black Mountain comme les refourgueurs de riffs style 1970’s est injustement myope, avec les anomalies apparentes de leur discographie - la pop insouciante de No Satisfaction, la transe hypno-drone de No Hits, ou l’allume briquet Stay Free. Ils se prouvent aussi variés que le culte Black Sabbath.
Au fond de leur cœur, Black Mountain sont des hippies pacifiques, mais de ceux qui n'ont pas peur de déployer l'artillerie lourde pour affirmer et protéger leur mode de vie. Courrez leurs cœurs à vos propres risques : si leur philosophie pouvaient être transformée en slogan, elle se lirait comme suit : «faites l'amour puis la guerre."
Sur le troisième album du groupe, Wilderness Heart, il y a un effort plus concerté pour concilier l'obscurité intérieure du groupe et la lumière extérieure, une symbiose reflètée dans le choix des producteurs : Randall Dunn, mieux connu pour son travail avec les géants de doom-metal Boris et Sunn O))), et D. Sardy, dont la longue liste de clients multi-platine comprennent Oasis et les Rolling Stones. Couplez les producteurs de grands nom avec la décision d'enregistrer à Los Angeles, pour ne pas mentionner leurs entrée en mainstrain avec le soundtrack de Spider-Man 3, et tout porte à croire que Wilderness Heart était le moment ou Black Mountain allait atteindre une dimension commerciale. Mais tandis que le nouvel album est certainement aussi simple et lumineux que In The Future est lourd, apocalyptique - pas de suites de 17 minutes prog-rock à trouver ici – ça ne dilue pas pour autant l’aspect nuageux et trouble du groupe.
Wilderness Heart est l’équivalent de Houses of the Holy côté Black Mountain, un album qui scintille autant qu'il retourne, s’amuse autant qu'il rage, tout en réfléchissant une sensibilité pop plus prononcée, qui travaille le plus souvent en faveur du groupe plutôt que de leur défaveur. Et tout comme la pièce de John Paul Jones, No Quarter, qui est sans doute le point culminant de Houses…, les moments les plus frappants sur Wilderness Heart viennent avec la contribution du claviériste Jeremy Schmidt – qui ajoute son épaisseur, sa profondeur aux tons violacés sur Old Fangs, où il se montre plus lourd que le riff glam-métal qui court au-dessous. Et au lieu de tomber dans le solo de guitare de rigueur, le groupe lui permet de barbouiller des couches de synthé rêveuses autant que perçantes. De même, ses décors sur les rêveries stoner-folk Radiant Hearts et Buried by the Blues remodèlent ces interludes acoustiques dans une lumière plus majestueuse.
La prestation de Schmidt met en évidence que Black Mountain est de moins en moins dépendant d'une attaque d’accords monolithique pour jouer davantage avec les forces et les subtilités de chacun de ses membres. Bien sûr, Wilderness Heart possède le plus féroce titre de Black Mountain à ce jour dans Let Spirits Ride - qui prend le riff proto-speed-metal de Black Sabbath Symptom of the Universe pour le réinterpréter. Mais la vraie révélation est The Hair Song, chantée à gorge déployée et qui, bien que bâtie sur une guitare acoustique, frappe aussi fort que tout le reste. La chanson est aussi basée sur la confluence croissante des voix de McBean et d’Amber Webber - quand ils ont été initialement présentés comme contrastes, les deux en sont maintenant à prolonger la peine de l’autre. Et dans certains cas, Webber vole même la chanson du chanteur de facto McBean, ses chœurs sur Roller Coaster, élevant le titre hors de son marais boueux.
Pour un album qui présente un Black Mountain plus assuré, c'est une déception mineure qui Wilderness Heart n’atteigne moins un climax qu’il ne le quitte graduellement, et qu’il manque un final à couper le souffle pour couronner le tout. Mais même dans leurs moments les plus calmes, le groupe peut encore vous laisser en suspens - le titre de clôture est peut-être la première ballade acoustique de Black Mountain dédiée à une fille, mais sans hasard c'est un nom (Sadie) qui est fortement évocateur des meurtres de Manson, et la chanson d'évoquer la ligne ténue entre la béatitude, les hippies épris de liberté et l'anarchie violente. Et comme la chanson s'éteint dans une procession sinistre et tribale, vous n'êtes toujours pas sûr du côté vers lequel Black Mountain va pencher la prochaine fois.
Ma Chronique
Un album beaucoup plus riche que ce qui pourrait paraître au premier abord, et qui est le reflet presque parefait d’un groupe jouant avec engagement et honnêteté. Une référence au Pink Floyd de Syd Barrett s’est glissée dans Buried by The Blues, je vous laisse l’écouter (pour transformer ça en jeu san obligation d'achat, demandez-moii la chanson, je vous l'enverrai)… Il y a sans doute beaucoup à découvrir en termes de paroles. Les attaques pessimistes restent cependant pesantes et le disque semble souffir d’un manque d’humour – ne serait-ce que d’ironie. Dommage étant donné qu’on assiste à un groupe complètement dédié à ce qu’ils font.
- Parution : septembre 2010
- Label : Jagjaguwar
- Producteurs : Randall dunn et D. Sardy
- Genre : Hard Rock, Folk, Psyché
- A écouter : The Hair Song, Wilderness Hearts, Roller Coaster
- Note : 6.25/10
- Qualités : rétro, sombre, groovy
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire