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vendredi 4 février 2011

Agnes Obel - Philarmonics (2010)



Parution : 2010
Label : Pias
Genre : Folk
A écouter : Riverside, Just So, Beast, Over the Hill

Note : 7.50/10
Qualités : ambigu, nocturne

L’enregistrement de musique « populaire » s’est beaucoup démocratisé ces dernières années. Alors que produire un disque était auparavant réservé aux plus vaillants, aux plus combattifs (il suffit de voir le parcours de Nick Drake pour comprendre), concrétiser un projet n’est plus une affaire de tempérament. Il faut encore y croire en tant soit peu, bien sûr, mais on peut envisager un album avec plus de sérénité. « Je n’ ai pas la sensation d’être motivée par la colère, la revanche ou la frustration », explique Agnes Obel notamment dans une interview donnée à Hugo Cassavetti, l’un de ses grands fans. Agnes Obel, comme Soap and Skin (Autriche) ou Perfume Genius (Etats Unis) est de ces artistes fragiles qui n’auraient pas vu le jour si la conjoncture avait été un peu différente. C’est comme ces phénomènes naturels qui ne se produisent que lorsque plusieurs conditions sont réunies. Ce n’est pas les rares éclipses, mais d’innombrables miracles discrets, dont la plupart ne sont pas visibles à l’œil nu.

Plus important, des artistes qui n’ont rien d’un caractère dominant peuvent s’exprimer à loisir et aujourd’hui être entendus par le plus grand nombre, appréciés en débranchant les guitares de nouveau voire à favoriser des instruments aussi contemplatifs que le piano. Si j’avais ce qu’il faut d’application pour concrétiser ma propre vision, j’aurais composé des mélodies du genre de celle de Riverside, le second titre de Philarmonics. Le succès du premier disque de la danoise Agnes Obel, qui trouve encore un écho médiatique six mois après sa sortie prouve que ce genre d’exercice vaut la peine. 

Philarmonics. Un titre bien peu intime, même si l’on peut se demander quel genre d’orchestre s’accorde au moment où les éléments de la musique – une voix et des notes de piano, un peu de violoncelle ou de harpe  – se mettent en branle. Ce genre de disque limpide est forcément ambigu. Riverside serait t-elle une chanson du même acabit que River Man, de Nick Drake ? Cette histoire d’une femme contemplant, depuis la berge, une rivière nous laissant nous interroger sur le possible espoir qu’elle est censée véhiculer, ou au contraire sur une pulsion suicidaire ? La musique est d’une simplicité désarmante, mais jamais vide de sens ; il y a symboles, significations, anciens sentiments remontés à la surface au moment de s’y mettre, et bricolés un peu à la manière de vieux trucages de cinéma.

« Très tôt, les films d’Hitchkock m’ont marquée. J’adore son style énigmatique, son esthétique d’une très grande sophistication et beauté, mais toujours d’une extrême simplicité. Les images et les mélodies les plus épurées sont mes principales sources d’inspiration et d’émotion. » L’intérêt de Obel pour l’univers d’Hitchkock va de soi ; faire écouter son disque c’est avant tout manipuler l’auditeur ; susciter l’émotion, le charmer bien sûr, une légère nostalgie peut –être : mais surtout, le faire réfléchir, le hanter après coup, par des tournures personnelles, par une façon légèrement décalée dans le temps et l’espace, pas tout à fait réelle. La musique flottante nous inviter à flotter avec elle, c'est-à-dire à renoncer à notre enveloppe – à nos principes, aux choses dont on était persuadé. Une douce bizarrerie que le maître du suspense faisait contenir dans des détails comme les portraits d’oiseaux inquiétants dans Psychose, répondant trop au profil aquilin d’Anthony Perkins pour que celui-ci soit exempt de tout soupçon de détresse. A l’arrière de la pochette de Philarmonics, le regard perçant d’un hibou peut-être empaillé. Agnes Obel n’est à priori pas en détresse ; mais un peu illuminée.

Il est difficile de pointer l’humeur dans sa voix. Et elle ne facilite pas les choses en donnant pour seule base d’appréciation une affiliation avec la musique en suspens qui accompagne  cette voix. « Je ne me vois pas comme une chanteuse qui joue du piano. Le piano et le chant sont deux choses égales pour moi – peut-être pas inséparables mais très connectées. Vous pouvez dire qu’il s’agit de deux voix égales.” Les textes chantés n’ont d’ailleurs pas toujours été évidents. ”J’ai toujours été attirée par les mélodies toutes simples, presque enfantines. Que j’entendais comme des chansons. J’ai d’ailleurs mis longtemps avant d’écrire des textes, les airs que j’aime me semblaient déjà raconter une histoire, projeter des images. Et puis écrire des paroles qui ont du sens mais dont les mots restent de la musique est si difficile. » Onze chansons, et une douzième ; I Keep a Close Watch, chanson d’amour sublimement écrite par John Cale, du tandem mythique qui donna le Velvet Underground.

Cette quiétude la fait parfois sembler d’un autre âge. C’est comme d’écouter l’Arabesque n°1 de Debussy, et il y a aussi parmi ceux qui l’ont inspirée Maurive Ravel, Eric Satie ou le pianiste suédois de jazz Jan Johansson, qui reprend au piano des chansons folk traditionnelles. Mis Obel sera rapidement rattrapée par les temps modernes, puisque l’entêtant Just  So a servi pour illustrer une champagne publicitaire de la compagnie Deutche Telekom outre-Rhin. On comprend mieux pourquoi en écoutant le refrain.  « Someday, it’s gonna be the day/Your hear Somebody Say/We need you right away ». Mais on ne doute pas que Obel fasse de la musique pour trentenaires plutôt que pour les anciens ; une musique pour combler les premiers véritables doutes, le sempiternel questionnement à l’entrée d’un monde complètement adulte.




3 commentaires:

  1. Bonjour,

    On lit Télérama par ici ;)

    Après avoir vu la couv' de la revue suscitée, je me suis empêché d'écouter l'album de la demoiselle (on peut le trouver sur Spotify).

    Rien de bien nouveau sous le soleil, mais ça fonctionne bien. Très bien même pour mes oreilles, puisque j'en suis à la 4ème ou 5ème écoute aujourd'hui.
    Les mélodies d'Agnès Obel me rappellent souvent celles de Laura Veirs, ainsi que la voix parfois. Suis-je le seul à avoir cette impression ?

    Un 1er album qu'on espère suivi d'autres de cette qualité.

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  2. Non j'ai eu la même impression que toi Eric notamment sur le titre Brother Sparrow si cela peut te rassurer ! :-)

    C'est un très bel album, très sensible !

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  3. Je l'ai offert à mon père pour ses 67 ans. La musique transcende parfois l'âge.

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