Parution : mai 2010
Label : Klangbad
Genre : krautrock, Indus
Label : Klangbad
Genre : krautrock, Indus
A écouter : Feed the Greed, Hit Me, Drug Wipe
Note : 7.25/10
Qualités : audacieux, bruitiste, original
Faust peut-il être anecdotique en 2010 ? Impossible. Au début des années 1970, ce groupe discret mais reconnu comme l’une des plus importantes formations de rock expérimental Allemand - krautrock - (avec Can, Neu !, Tangerine Dream, Kraftwerk, Ash Ra Tempel, Amon Duul...) avait sorti trois disques, Faust, So far et The Faust Tapes, qui eurent un retentissement innatendu. L’attrait du groupe était d’opérer dans une optique punk et DIY, préférant garder sa musique comme inachevée et lui laisser cet aspect de montage dans lequel ont peut voir toutes les ficelles. Ils furent la continuité de Franck Zappa, opérant avec le même sens de l’observation et et de la récupération et le dépassèrent selon Julian Cope (dans Krautrocksampler) parce qu’ils firent preuve de plus de bon goût. Surtout, avec eux on peut dire que les Stooges ou le MC5 ont influencé le krautrock.
Dans l’émulation de l’époque, Faust était de ceux qui semblaient avoir cent bonnes idée à la seconde. Avec leur son brut, furent le véritable sursaut rock’n’roll en provenance d’Allemagne, plus indomptés, bruyants que les autres, à un moment ou les musiciens ouest-Allemands phagocytaient toute la culture anglo-saxone qu’ils trouvaient consensuelle pour en éclater les formats. Pourtant, ils rencontrèrent beaucoup plus de succès en Angleterre. Ils se sont fait oublier dans les années 80, et se sont séparés en deux entités distinctes. Faust est un cas unique puisqu’il est constitué de deux formations distinctes qui produisent des disques assez égaux en termes de qualité mais avec une approche un peu différente – ici, avec Hans Joachim Irmler, l’approche studio est privilégiée. C’est la recherche de l’impact le plus rude, de la transformation la plus iconoclaste.
Faust Is Last est le disque de krautrock que j’ai le plus écouté – à l’exception notoire de ceux de Kraftwerk. J’ai déjà écouté …Is Last deux fois en entier ! Chose assez périlleuse, mais on parvient finalement à comprendre comme est construit ce brillant panorama de kosmiche musik pour le XXIème siècle. Soit un mélange de musique proto-industrielle (Nine Inch Nails), d’improvisation et de rock garage. Dans cette dernière catégorie, l’excellent Hit Me, qui ressemble à un enregistrement pirate des Stooges qui essaieraient de jouer Interstellar Overdrive de Pink Floyd. De manière générale, le son n’est pas toujours aussi (volontairement) pourri, mais les guitares ont souvent un destin funeste dans le champ d’action de Faust. Et le fait qu’elles soient au premier plan, comme tout ce qu’il y a de plus bruyant et maltraité par le groupe sur ce disque, donne un relief qui évoque la modernité des Flaming Lips sur Embryonic. Une vision cosmique autant que brute.
Malgré sa production toutes dents dehors, Faust Is last embrasse de manière superbe les vingt dernières années de musique rock, sans faire oublier les tréfonds de sagesse sonique d’où il est issu. Ainsi, les deux morceaux qui ouvrent ce double disque et font office de suite d’introduction, sont planants et comme d’une autre époque. Faust a toujours trouvé ses forces dans un environnement extra large, combinant des ambiances qui n’avaient rien de commun. Le troisième morceau ici est une énorme surprise pour qui n’a jamais été en contact avec le son du groupe ; un maelström strident mené par une guitare rythmique machinesque, encerclé de claviers inouïs et orientalisants, et pour quelques instants imprécations caverneuses absolument géniales. Si il s’agit d’un disque progressif et intimidant, on est définitivement conquis dès la cinquième minute.
Le premier disque déploie ainsi une série de titres disparates, surtout dans sa deuxième moitié – voir le très américain I Don’t Buy Your Shit no More, le genre de titre qui rappelle que les gars de Faust sont des rockeurs presque comme les autres... Le son y est très premier plan, chaque note semble faite pour être vraiment entendue. Faust ne joue pas dans l’ordre du subliminal, malgré toutes les énigmes qu’il aiment laisser planer. Ils préfèrent l’exploration agressive - les sons percussifs de Chrome, les motifs industriels sur Drug Wipe – qu’un psychédélisme qui nous laisserait l’esprit absent. L’auditeur est mis à partie, surpris et brusqué dans les meilleurs moments.
Quand au second disque… il est peu probable qu’aucun groupe de post-rock du moment ait une démarche aussi audacieuse en remportant autant de succès qu’ils le font ici. Peut-être parce qu’au-delà des brumes vaporeuses de formes intangibles, la musique de Faust gagne de ce côté-là un pouvoir d’évocation cinématique. Un spectacle de sons étranges, sept morceaux mystérieux qui s’écoutent comme une séquence d’un seul tenant, culminent et s’éteignent avec Primitivelona.
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