Parution : 1971
Label : Mushroom Records
Genre : Folk expérimental, sitar, songwriter
A écouer : Black Cat, Harvest Song, High Street
°°
Qualités : feminin, intimiste, élégant
L’album éponyme du groupe Magic Carpet est l’un de ces disques uniques à avoir vu le jour au début des années 1970 en Angleterre. Réunis autour de la jeune Londonienne Alisha Sufit, le groupe fit quelques concerts et émissions de radio après la sortie de ce disque, avant de se dissoudre après juste un an d’existence. Ils se reformèrent, sous le nom de Magic Carpet II, pour un seul nouveau disque, Once Moor, en 1996.
Alisha Sufit était tombée sous le charme de la musique indienne alors qu’adolescente, elle vit The River, de Jean Renoir. « Quand j’étais jeune j’avais l’impression d’avoir été hindoue dans une vie précédente », se souvient – elle. "J’ai découvert Ravi Shankar quand j’avais 16 ans. Mes parents ne pouvaient pas comprendre comment je pouvais aimer sa musique. Je ne pouvais pas comprendre qu’ils ne puissent pas l’aimer. » Sa mère décéda alors qu’Alisha avait 18 ans, et elle s’échappa de ces années difficiles à travers le chant, encouragée par un ami guitariste. « Ca a été une renaissance, tout est revenu à la vie », décrit t-elle de son expérience. Sa voix fut par la suite souvent comparée à celle de Joni Mitchell. Elle emprunta la guitare espagnole de son père et s’en vint jouer sur le marché de Portobello. Lorsqu’on lui demanda si elle voulait rejoindre un groupe, elle répondit que ce serait à la condition qu’il y ait un tabla et un sitar dans la formation. Elle rejoignit ainsi le trio Sargam, dont le premier album, Pop Explosion Sitar Style, avait été un désastre ; même le nom sur la pochette était mal épelé. « Comme j’écrivais de nombreuses chansons en accords modaux ouverts, elles étaient instantanément compatibles avec les accordages de sitar. Tout s’est passé de manière relativement naturelle. »
Une fois Sufit en place, et le groupe renommé Magic Carpet, le parfait assortiment des sons qu’ils proposaient ensemble, ainsi que la relation passionnée et naturelle de la chanteuse à la musique hindoue, produisirent des résultats convaincants, voire enchanteurs sur des morceaux comme Black Cat, Harvest Song ou High Street. Sur cette dernière, la voix d’Alisha Sufit atteint un genre de perfection intime, atteignant toute les plus haute notes, les séduisantes, les plus mystiques. Musicalement, la combinaison de musique hindoue et de folk anglais n’avait pas été aussi solide depuis l’immense succès de 5000 Spirits or the Layers of the Onion, l’un des mètres-étalons de la scène expérimentale britannique qui allait continuer de bourgeonner jusqu’au milieu des années 1970.
Au sein de cette scène, Magic Carpet trouva sa propre empreinte sonore et visuelle, donnant comme d’autres un sens personnel au psychédélisme des années 60, ne l’utilisant pas seulement comme une fin en soi. Au centre du groupe était une motivation pour comprendre la musique hindoue et non seulement une propension à en reproduire des schémas. Des titres comme The Phoenix ou Do You Hear the Words montrent une véritable fusion de styles. Cette motivation fait que chaque morceau de l’album atteint un état de plénitude artistique, carillonnant des brides d’un rêve solidement rattaché à la réalité d’un talent brut. Qu’il s’agisse d’instrumentaux ou de chansons, le disque fait preuve d’une légèreté aérienne qui ne doit pas faire oublier la relative complexité, voire fragilité, de sa conception. Pour Alisha Sufit, née en 1946, ce n’était que le début d’une aventure qui devait embrasser la musique, avec de grands disques comme Alisha Through the Looking Glass (1993), aussi bien que le dessin ou la peinture.
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