“…you can hear whatever you want to hear in it, in a way that’s personal to you.”

James Vincent MCMORROW

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Trip Tips - Fanzine musical !

dimanche 13 novembre 2011

Gary Numan

La pochette pour Replicas, le second album de Tubeway Army (le premier, éponyme, est paru un an auparavant), en raconte sur le chanteur et parolier de ce trio de la fin des années 70, le londonien Gary Numan. On l’y voit raide et blanc, parfaitement ambigu avec ses habits noirs, ses ongles peints et son reflet doué d’une vie autonome dans le carreau. A l’extérieur de la fenêtre à l’anglaise, une enseigne lumineuse, ‘The Park’, en référence à l’une ses plus belles compositions. Une vision longuement murie, même si l’on sait depuis que plusieurs aspects du personnage public de Gary ‘Numan’ Webb sont issus d’accidents. Il en va ainsi de son teint blafard, imposé à l’origine par les maquilleurs au moment de l’entrée en scène du chanteur à l’émission de Top of the Pops, quand celui-ci, agé d’a peine 20 ans (il est né en 1958), avait le visage couvert d’acné. Quant à son image comme héros d’un univers de science fiction glauque, elle n’est d’après lui pas tellement justifiée. « Pour être honnête, je n’ai jamais écrit qu’une poignée de chansons qui étaient connectés à la science-fiction. L’album Replicas, ou des morceaux de cet album, une ou deux choses sur The Pleasure Principle et sur Telekon » (1979 et 1980).

Cette période fut brève – deux ans – mais féconde – trois albums - , marqua l’histoire de la pop synthétique et prépara la voie pour des groupes qui deviendraient de grosses machines quelques années plus tard : The Human League, Duran Duran ou Depeche Mode. Replicas, présentant à l’auditeur un monde dérivé de la nouvelle Do Androïds Dream of Electric Sheeps de Philip K Dick (1968, elle inspira aussi le film Blade Runner à paraître en 1991) est pourtant un disque particulièrement personnel, dont le matériau a failli donner un livre autonome de la main de son créateur, et qui représente pour beaucoup de « numanoïds » (les fans auto-proclamés de Gary Numan à l’époque) sa meilleure incarnation à ce jour.

Nous avons une sombre trame où les humains sont maintenus en captivité par des machines (ou 'machmen') pour le compte d’une autorité invisible. Numan aura d’autres occasions de paraître menaçant, et notamment en 1994 et après une décennie de malheur artistique, avec Sacrifice. Mais il n’est en réalité que victime de la trame qu’il a créé ; plongé sur Replicas, par sa volonté, dans un vide affectif, comme le sera plus tard l’un de ses sbires, Marilyn Manson. C’est un simple humain, car c’est de ce point de vue que se passent les choses les plus intéressantes, que les sentiments peuvent être aliénés, changeants. Outre K.Dick, on pense à J.G. Ballard, Burroughs, Kafka, et Numan se range par les thèmes aux cotés d’autres groupe new-wave (entendre de punk synthétique), Devo et Kraftwerk (voir Trip Tips 2). La ‘trilogie berlinoise’ de David Bowie et en particulier Low et des morceaux comme Speed of Life et Breaking Glass l’inspirent beaucoup. La manière dont Kraftwerk ou le duo Bowie/Brian Eno traitaient les instrumentaux – les uns avec un Neon Lights mélancolique et poétique (sur The Man Machine, un autre grand disque où ils est question de robots), les autres avec le sépulcral Warszawa par exemple – le fascinent à juste titre. Sur scène, il introduit l’extravagance héritée du glam rock (Bowie, Marc Bolan…), mélangeant comme Adam Ant punk et excentricité, entre Ziggy Stardust et saveurs nouvelles.

Dans l’imagination du jeune musicien, les claviers gras et les boîtes à rythme primitives prennent une tournure résolument originale. Un balancement de goule se reposant fortement sur des mélodies tournoyantes, s’inscrivant dans une dynamique rock. « You know i hate to ask/but are friends electric ?/Only mine’s broke down/And now I’ve no-one to love. » C’est Are ‘Friends’ Electric, où le personnage s’interroge sur la qualité de sa prostituée, humaine ou robotique. Le simple fut un succès majeur en Angleterre, où le retentissement de l’artiste se fait encore sentir au moment de son nouvel album soigné mais consensuel, Dead Son Rising (2011). La suite de l'album continue dans la veine rock n’roll, particulièrement mélodique et plein de fêlures volontaires ou non. Le timbre de voix de Gary Numan est aussi de ces artifices dignes d’entrer dans l’histoire de la pop musicale de son pays, pour le moins ; capable d’insuffler vie et mouvement à ses mises en situation claustrophobes, d’y projeter l’ombre d’une dérision. Dans un monde d’ambigüité et de paradoxes, cette ironie le rend plus fort.

Au moment de la sortie de ce disque, Gary Numan devient le leader incontesté de Tubeway Army, un groupe qui va bientôt imploser pour laisser place à une incarnation solo dans laquelle Numan va peu à peu prendre de l’épaisseur, laisser sa sensibilité et sa personnalité s’exprimer, d’abord dans le dédain – avec son chef d’œuvre The Pleasure Principle, et l’anti-star system Telekon. S’il devait n’en rester qu’un, ce serait ce Pleasure Principle. Un disque montant en puissance et en qualité au fil des morceaux, un simple parfait, Cars, un groupe ressoudé autour de son chanteur et un riff létal, Metal. Commercialement parlant, c’est l’apogée : Telekon, malgré sa qualité et sa plus grande complexité, ne fera qu’annoncer le malaise artistique de Numan pendant les années 1980 (Dance (1981), I, Assassin (1982), Warriors (1983)), alors qu’il tente – notamment en montant son propre label, Numa – de renouveler l’intérêt de son public. Cette crise passe aussi par la décision de se retirer un temps de la scène. Il faudra attendre le milieu des années 1990, et quelques figures acrobatiques dans l’un des ces avions de la Seconde Guerre que Numan pilote à l’occasion d’exhibitions dans toute l’Europe, pour qu’il décide d’exprimer à nouveau des sentiments plus personnels à travers sa musique, plutôt que de tenter chaque année une nouvelle invasion ratée des classements de ventes.

Son romantisme particulier et son humour un peu noir demeurent cependant comme une marque indélébile, capturés dans Down, in the Park, chanson paranoïaque culte qui donne sens à cette fichue enseigne lumineuse : 'Down in the park/Where the machmen/Meet the machines/And play ‘kill-by-numbers’/Down in the Park/With a friend called ‘Five’. Plutôt que chanson nihiliste, Down in the Park est l’un de ces éclairs empathiques que Gary Numan a laissé en héritage à tous ceux qui le respectent et qui l’inspirent. En témoigne la belle version interprétée par le pianiste Mike Garson lors d’un concert de Nine Inch Nails en 2009. Durant la même tournée, Numan en compagnie d’un Trent Reznor reconnaissant les morceaux Cars, Metal ou I die : You Die. L’influence que Reznor reconnaîtra à la musique de Numan, qui n’est pas tellement plus âgé que lui, est réciproque : Numan citera Closer, tiré du concept album The Downward Spiral (1994), de Nine Inch Nails, comme chanson favorite. Avec Beck, Tricky, Damon Albarn ou Queens of the Stone Age invoquant sa légende, à l’approche de la cinquantaine Gary Numan prend la main sur tous les aspects, visuels aussi bien que musicaux, de sa carrière.










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