Parution : juillet 1974
Label : Reprise
Producteur : Neil Young, David Briggs, Mark Harman, Al Schmitt
Genre : Rock
A écouter : Revolution Blues, On the Beach, Ambulance Blues
°°°°
Qualités : vibrant, sombre, engagé, sensible, culte
Les années 70 ont contenu un orage étouffé, quelques grands disques à la fois abrasifs et éteints, comme Sticky Fingers (1971) ou On The Beach. Si Sticky Fingers est largement reconnu comme l’un des fleurons du rock, un statut qui devrait logiquement l’embarrasser – à cause de morceaux comme I Got the Blues, Sister Morphine ou Dead Flowers, qui lui donnaient à la fois sa poisse et son aura. On the Beach est paru en 1974, alors que les désillusions politiques et les pertes d’amis laissaient Young dans un dénuement proche du cynisme. On the Beach est trempé dans des émotions exténuantes et ne contient aucun des titres les plus célèbres de Neil Young, ce qui en fait un second couteau de sa discographie largement restée dans l’ombre de Harvest (1972) – pas l’un de ses disques les plus intéressants vu d’ici. Il a aussi souffert d’être longtemps resté inexistant en CD, tout simplement parce Young n’aimait pas trop ce format jusqu’à ce qu’il estime que les techniques avaient fait suffisamment de progrès pour rapprocher le son du compact-disc de celui des vinyles. Comme d’autres oubliés tels American Stars and Bars (1977), On the Beach existe de nouveau, dans sa jaquette symbolique, à l’épreuve de la modernité. Une plage maussade, où les impressions laissées dans le sable n’ont pour vocation que de s’effacer, est d’ailleurs l’endroit idéal pour l’écouter.
Label : Reprise
Producteur : Neil Young, David Briggs, Mark Harman, Al Schmitt
Genre : Rock
A écouter : Revolution Blues, On the Beach, Ambulance Blues
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Qualités : vibrant, sombre, engagé, sensible, culte
Les années 70 ont contenu un orage étouffé, quelques grands disques à la fois abrasifs et éteints, comme Sticky Fingers (1971) ou On The Beach. Si Sticky Fingers est largement reconnu comme l’un des fleurons du rock, un statut qui devrait logiquement l’embarrasser – à cause de morceaux comme I Got the Blues, Sister Morphine ou Dead Flowers, qui lui donnaient à la fois sa poisse et son aura. On the Beach est paru en 1974, alors que les désillusions politiques et les pertes d’amis laissaient Young dans un dénuement proche du cynisme. On the Beach est trempé dans des émotions exténuantes et ne contient aucun des titres les plus célèbres de Neil Young, ce qui en fait un second couteau de sa discographie largement restée dans l’ombre de Harvest (1972) – pas l’un de ses disques les plus intéressants vu d’ici. Il a aussi souffert d’être longtemps resté inexistant en CD, tout simplement parce Young n’aimait pas trop ce format jusqu’à ce qu’il estime que les techniques avaient fait suffisamment de progrès pour rapprocher le son du compact-disc de celui des vinyles. Comme d’autres oubliés tels American Stars and Bars (1977), On the Beach existe de nouveau, dans sa jaquette symbolique, à l’épreuve de la modernité. Une plage maussade, où les impressions laissées dans le sable n’ont pour vocation que de s’effacer, est d’ailleurs l’endroit idéal pour l’écouter.
On pourrait, sans évoquer le moindre morceau de ce disque, lui faire une réputation insalubre en se perdant en légendes – l’état déplorable de Young sur scène à l’époque, et, étant donné qu’On the Beach semble enregistré dans des conditions live, la manière dont son attitude éhontée avec l’alcool et les substances perce à travers sa façon de chanter. Mais le disque est peut-être l’œuvre d’un musicien plus lucide que prévu, dont la voix maladroite ne reflète que le dépit. C’est toujours plus facile de donner une image infréquentable du musicien pour mettre son disque en valeur – même les Stones n’ont pas toujours été si glamour – que d’en faire l’exacte somme de ses intentions, que d’admettre qu’il s’agit d’un pamphlet de quelque sorte que ce soit. On the Beach n’est peut être pas aussi cynique et fielleux que cela, mais Young ne dissimule plus qu’il puisse être farouche. En réalité, Neil Young avait déjà recouvré ses esprits depuis Tonight’s the Night (enregistré avant mais sorti après) – et ce qu’il voyait, au sortir du deuil d’un ami, avec son regain de sagesse, ne lui plaisait pas du tout. C’est plutôt alors le disque d’une rage lucide que celui d’une déprime égoïste, n’en déplaise à ceux qui en auraient fait leur compagnon dans la défonce. Le désespoir est derrière lui.
Toutes ces réflexions semblent bien vaines aux premières écoutes du disque. Walk On va y rester le parent sympathique, fréquentable, peut-être anecdotique malgré son cynisme latent. See the Sky About to Rain décevra sans doute, dans un premier temps, par sa simplicité. Mais c’est la promesse que ces titres, malgré de puissants messages, pourront être réécoutés des centaines de fois sans lasser, dans l’appréhension de ce Revolution Blues qui est la meilleure chanson de Young post-After the Gold Rush. Ce disque a l’extraordinaire pouvoir de vous imbiber, et See the Sky About to Rain est un buvard. Sur Revolution Blues : « On vit sur un plateau en bordure de la ville/Tu ne nous vois pas parce que nous n’y allons jamais On a vingt-cinq fusils seulement pour empêcher la population d’augmenter/Mais on a besoin de toi maintenant/c’est pour ça que je suis venu » « Je suis un barillet de rires/avec ma carabine j’entretiens leurs espoirs/jusqu’à ne plus avoir de munitions. » Et après mûre réflexion : « J’ai entendu que le Laurel Canyon est plein de stars connues/Mais je les déteste plus que des lépreux et je vais les tuer dans leurs voitures. ». Sur cette chanson terrifiante et irrésistible à la fois, inspirée par Charles Manson que Young a rencontré, il n’a jamais été aussi incisif, et la musique qui l’accompagne est d’une efficacité redoutable (le groupe est alors constitué de Ben Keith, Tim Drummond et Ralph Molina, et voit la participation entre autres de Crosby et Nash).
Puis l'halluciné For the Turstiles, et le quasi-distrayant Vampire Blues, dont l’introduction nous replonge effectivement dans le pot des vieux classiques de la musique noire, avant de se muer en rock, sans perdre son groove poussiéreux. « I’m a vampire babe/sucking blood from the earth/I’m a vampire babe/so you’re twenty dollars’ worth ». La guerre continue sous une forme différente. Avec parfois la tentation de tout abandonner. Sur le morceau titre : “I need a crowd of people/but I can’t face them day to day” “I went up to the radio interview, but I ended up alone at the microphone”. Sombre réflexion sur les à-côtés de la célébrité. Sur Motion Pictures, Young dépeint de manière subliminale sa relation avec l’actrice Carrie Snodgress. A la fin, Ambulance Blues est la magistrale complainte du chanteur envers ses critiques. Le tempo ralentit imperceptiblement jusqu’à la dernière note. Les trois derniers morceaux, qui occupent la deuxième face du vinyle, ont la faveur de Young.
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