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dimanche 28 octobre 2012

Concert - Diane Cluck @ La Loge - 26/10/2012


Diane Cluck (à droite) avec isabel Castellvi (violoncelle)

 
Je souhaite avant tout remercier Laurence Buisson, fan n°1 de Sharon Van Etten en France J et conquise par la cause du Ladyfest comme je le suis, sans laquelle je n’aurais jamais assisté à cet adorable concert. Merci Laurence ! <3 strong="strong">
Le festival Ladyfest est auto financé, et donc indépendant. Animé par huit jeunes militantes, il s’est révélé une alternative très intéressante à la morosité du mois d’octobre, en s’adaptant parfaitement aux circonstances. Un concert en témoigne : celui de Diane Cluck, chanteuse américaine à l’image du festival : passionnée, humble, indépendante, brillante. Sharon Van Etten avait ouvert le Ladyfest et en demeure la tête d’affiche incontestée, apparaissant encore dans les conversations quatre semaines après être repartie pour New York. L’émotion fulgurante qui a parcouru l’échine des garçons et surtout des filles rassemblé, nombreux, au Café de la Danse ne saurait être reproduite plus avant au cours du festival, et l’utilisation de cette vaste salle n’a pas été réitérée dans la suite des festivités ; les concerts se sont faits plus intimes, l’équipe du Ladyfest demeurant le noyau amical autour duquel gravitent quelques personnes déjà inconditionnelles de l’esprit du festival, à défaut d’en avoir toujours acheté le sac (8 petits euros) qui leur apporte leur financement. Nous sommes à la Loge, avec quelques soixante personnes venues voir Diane Cluck.
Si Sharon est revenue encore dans une discussion, c’est parce qu’elle s’était montrée très enthousiaste, lors de son dernier passage, en s’apercevant que Diane Cluck était également l’invitée du festival. Cette dernière nous a raconté qu’encore toute jeune, Sharon lui envoyait ses démos et lui demandait son avis sur ce qu’elle enregistrait, éprouvant une grand admiration pour elle. Diane Cluck apprécie maintenant avec fierté le parcours plein de promesses de sa jeune comparse.
Wear The Trousers Magasine a placé Oh Vanilla (2003) au 14ème rang de meilleur album de la décennie 2000-2010. Enregistré avec l’aide du musicien de jazz Todd Horton, cet album reste le véritable acte fondateur qui permit à Diane Cluck d’exporter, petit à petit, à  son échelle, sa musique, et lui a valu une admiration en progression constante de la part de gens du monde entier. Avant ça, elle les capturait souvent sur des casettes, les manufacturait et les distribuait elle-même. Les enregistrements de cette époque sont en conséquence parsemés de bruits parasites.
Les oreilles aguerries de la presse  attentive n’ont pu que multiplier les commentaires élogieux après avoir entendu ce que ‘folk intuitif’, dans la bouche de Diane Cluck, voulait dire. A la voir sur une certaine photo, c’est un peu comme faire de la confiture. Je n’en connaissais rien : une voix extraordinairement riche, utilisée comme un instrument magique, et une volonté presque farouche d’explorer plus avant, d’un couplet à l’autre, les contours lumineux de ses poèmes obscurs et foisonnants m’ont sidéré, et ont renouvelé en moi la foi en ce genre folk parfois banalisé, ont inspiré de nouvelles idées sur ce que doit, ce qu’il peut être ; une musique profonde, une expérience totale et sans aucun cliché. L’influent Mojo Magasine plaçait en 2005 Countless Times en deuxième position de sa liste des meilleurs albums Underground de l’année. Undergound ? Malheureusement. Dans certains concerts qu’elle a joués en Europe avant de passer par Paris elle jouait pour moins de dix personnes. « Ce n’est pas grave, je reviendrai’, confie-t-elle.  
Mais c’est qu’elle n’a pas sorti d’album depuis longtemps, utilisant son site internet un système de suscription baptisé ‘song of the week’ pour vendre ses chansons. Une pratique discutable, puisque le coût de la conception des chansons – enregistrement, mixage, mastering, déplacement auprès des collaborateurs – est difficile à résorber de toute façon, et que l’absence d’album lui empêche globalement d’attirer l’attention de la presse spécialisée.
Un EP de six titres a cependant été enregistré avant le début de la tournée européenne, de façon spontanée, et en compagnie de la violoncelliste Isabel Castellvi que l’on retrouvera le soir du concert. L’un des moments forts a été de les voir côte à côte, en train de chanter a cappella Petite Roses, un extrait de Oh Vanilla. Elles vous jettent un charme. Les deux vont naturellement interpréter les six chansons enregistrées ensemble, toujours aussi mystérieuses et abandonnées que ce que Diane Cluck a pu faire par le passé. Leur musique se complémente, s’entremêle. Castellvi sert d’oreille absolue à la chanteuse lorsqu’elle s’accorde, donnant son approbation à l’issue de la première note, avant de s’engager avec un visage rayonnant, dans une joute aussi enjouée qu’elle est intense, habitée d’une tristesse sublimée. Le niveau de liberté à l’œuvre est imbattable, c’est un sentiment impossible à étouffer, qui flotte autour de ces riches mélodies inspirées de musique classique, qui leur donne une beauté globale. Un sentiment de transcendance qui vous gagne au fur et à mesure du concert, ainsi qu’un confort total. La magie à l’œuvre est ce qui sépare concert et albums. Ceux-ci sont considérés par Diane Cluck comme de simples ‘collections de chansons’ qui ne peuvent égaler la façon dont ces chansons prennent vie chaque soir, façonnées avec toute l’intuition et l’audace nécessaires. Surtout que certaines d'entre elles ont plus de dix ans, et ont beaucoup évolué. Easy To Be Around et ses diamants (« I was in a coal mine picking up diamonds/that the miners had left behind ») ou Phoenix and Doves constituent des sommets de la soirée. C’est de là que vient, jurerait t-on, un peu de la désespérance défiante des premiers Sharon Van Etten. On reste avec l’impression que Diane Cluck est à la tête d'un répertoire au raffinement rarement égalé parmi ses pairs actuels.
De son côté, Laura J. Martin a introduit la soirée en faisant surtout montre d’un grand talent à la flûte traversière et d’une énergie traversée d’éclats de mysticisme. Auteure d’un premièr album charmant et versatile, elle laisse imaginer ce soir ce qu’aurait été les troubadours en marge de Woodstock s’ils avaient disposé de pédales de loop. Elle offre, souvent à mi-chanson, des moments de plénitude, d’intensité, à force de superposer en d’entrecroiser les parties instrumentales ou les brillantes utilisations de sa voix, qui n’est pas sans évoquer celle de Joanna Newsom.

Merci le Ladyfest, et à l’année prochaine !
Site officiel Diane Cluck
Bandcamp Diane Cluck
Facebook Laura J Martin :
Ladyfest
 

mardi 23 octobre 2012

Matt Elliott - The Broken Man (2012)

 
 
 
Parution : février 2012
Label : Ici d'ailleurs
Genre : Folk
A écouter : Dust, Flesh and Bones
 
OO
Qualités : sombre, envoûtant
 
Matt Elliott s’est maintenu dans une semi-pénombre tout au long de sa carrière juqu’à aujourd’hui, poussant tranquillement les frontière de son écriture dans vers un idéal de beauté et de désolation qui a des airs de logique inéluctable. Il est de ceux que l’on croise par hasard, parce qu’ils ne sont pas très loin, parce qu’ils ont la gentillesse de se produire à Toulouse pour 3 malheureux euros et de laisser le secret d’un moment hypnotique parmi le public clairsemé. Découvrir Matt Elliott est comme de se pointer dans l’arrière salle d’une brasserie de onzième arrondissement et de tomber sur Josh T. Pearson en train de jouer Honeymoon Great : Wish you Were Her, une litanie de plus de 13 minutes à la beauté terrassante, la clairvoyance en plus. Vous aimez Bill Callahan ? Matt Elliott a une voix grave, dans l’esprit de celle du parangon de Smog, même si il l’utilise ici avec une parcimonie qui tient plus de l’illustration que de la chanson, comme un autre instrument dans la fresque que constitue The Broken Man.
 
Les chansons sur cet album extrême, en un sens, sont austères mais denses d’une lucidité musicale, d’une inspiration qui leur donne un aspect grandiose. Démarrant souvent sous le joug d’une guitare hispanisante au jeu complexe, elles s’affirment avec un dessein extrêmement méticuleux et une sagesse à toute épreuve. Les suites qui constituent la première face du vinyle démontrent le pouvoir et la détermination de Matt Elliott à l’œuvre pour exprimer avec largesse les sentiments de regret et de solitude dans leurs infinies variations.
 
Ce premier jet culmine avec les dix minutes de Dust, Flesh and Bones, qui démarre comme une lamentation nue évoquant Leonard Cohen et s’oriente en volutes autour d’une phrase répétée, conjurant toute la conviction de d’Elliott envers sa propre sagesse affective. La chanson décolle lentement de terre, prend un tour presque effrayant avec ses chœurs murés, le son d’une cloche lointaine contribuant aussi à la sensation d’un vide immense qui s’ouvre de plus en plus sous nos pieds – un aspect atmosphérique qui fait de The Broken Man l’album le plus accompli de Matt Elliott à ce jour -, tandis que la voix circonspecte d’Elliott demeure, malgré tout, un élément auquel se raccrocher. Avec la confiance qu’il met à répéter « This is what it feels to be alone », on est convaincu que la solitude le hante depuis des années, et la chanson documente cette relation vaguement amusée avec elle. Le résultat est d’une beauté, d’une évidence extraordinaires. 
 
The Broken Man s’enfance plus avant, construisant son plus long morceau sur deux improvisations au piano semblant surgies des noirceurs d’une ancienne Vienne, retranscrite et interprétées par Katia Labèque. Matt Elliott multiplie encore la fascination produite par son œuvre, allant à rebours de la cohérence habituelle pour nous obliger à trouver de nouvelles pistes de lecture, entre acceptation d’un certain psychédélisme et reconstruction de quelque monument sonore gothique oublié. Derrière une prestation stoïque et confiante se révèle la force de chansons qui contiennent non seulement leur raison profonde, mais s’articulent en un tableau d’une force étonnante.


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