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lundi 30 mars 2015

DEATH GRIPS - The Powers That B (Jenny Death) (2015)




OO
intense, pénétrant
Expérimental, Hip-hop, Noise rock

The Powers That Be est un livre de David Halberstam qui décrit l'ascension des médias modernes comme instrument de pouvoir politique. La porosité de Death Grips aux termes de 'média' 'moderne' et de 'pouvoir politique' attendait simplement qu'un tel rapprochement soit fait. C'est aussi le nom d'une chanson de cet album (apparu sur le net sous le nom de Jenny Death parfois) qui en contient dix - et vient compléter la somme incroyablement cohérente constituée par les huit titres présents sur Niggas on the Moon (2014), le premier volet de cette opération de destruction/pénétration massive du stream des consciences. C'est bien d'avoir créé un buzz qui a culminé avec The Money Store, leur disque de 2012, pas le plus réussi pourtant. L'attention serait-elle retombée ? Ou plutôt, pendant combien de temps la folie turgescente de Death Grips allait pouvoir s'introduire dans les rouages du rock, de l'élecro, les musiques extrêmes ? Voyons maintenant si cet album, dont l'inespoir, la détestation, de la misanthropie placent la barre à un niveau séduisant - va triompher des rétifs. A écouter au casque d'abord, pour saisir le travail si précis et fou de Zack Hill, le Batteur du chaos. La prépondérance de riffs de guitare et de vraie batterie sur ce volet du double disque est un contre pied idéal à l'habillage de voix de Björk concassées du précédent. 

The Powers That B n'est pas simplement un double album, c'est une performance basée sur l’excitation du public avide d'en découvrir un peu plus sur ce trio de bruitisme - Hip hop surgit de nulle part en 2011. Un rempart à l'épreuve de toute la spéculation qui l'a précédé, et dans l'univers de Death Grips spéculation rime avec un autre mot qui décrit bien toute la jouissance, pour les convertis, à tenir enfin entre leurs mains un artefact à l'effigie de death Grips, plutôt que simplement les fichiers partagés gratuitement par le groupe lui-même jusqu'ici. Ceux qui connaissent la pochette de No Love Deep Web comprendront. 

Si I Break Mirrors With My Face in the United States puis Inanimate Sensation mettent la barre de la frénésie si haut, c'est pour faire mieux accepter le reste, qui se déploie sans reprise de souffle superflue. La virtuosité de tenir plus de cinq minutes à une telle intensité est répétée encore et encore, avec au cœur la chanson titre et Beyond Alive, avant que On GP annonce une reculade en rappelant les premières chansons du groupe sur ex Military. Dans ce maelstrom propre au recyclage souverain de certains de leurs morceaux passés, il retrouvent l'abrasion que Niggas on the Moon avait un peu éludée. Leur déclaration définitive. Où pourront t-ils aller après ça ? 

mercredi 18 juin 2014

DEATH GRIPS - Niggas on the Moon (2014)




O
expérimental, extravagant
Hip-hop 

C'est Gil Scott Heron qui disait que pendant que les américains envoyaient des blancs sur  la lune, ils laissaient les noirs mourir de la drogue dans leurs ghettos. A part le titre de cet album, rien de commun entre l'icone soul et la musique désintégrée et novatrice du trio, qui réunit surtout l'un des chanteurs hip-hop les plus immédiatement reconnaissables, Stefan Burnett ou MC Ride, et l'un des batteurs les plus précis du rock doublé d'un dissimulateur hors pair. Death Grips est continue d'être impossible à définir, à cerner, à part pour l'agression quasi gratuite qui le fait ressembler au hip hop le plus violent. Leur collaboraton avec Björk 'sur huit morceaux' a été vantée, ils ont en réalité rendu sa voix presque méconnaissable pour en faire une autre pièce de leur musique de prestidigitateur des ghettos. Depuis trois ans qu'ils paradent sur internet en offrant leurs albums gratuitement, ils n'avaient pas produit un album (qui est annoncé comme la moitié d'un album à paraître) aussi ramassé, ce qui porte les slogans hargneux de Burnett à frapper quand on arrive à la troisième écoute. Ils ont réussi à rendre addictifs même les sons et les phrases les plus létales, viscérales, multipliant les indices qui laissent présager que ce n'est encore qu'un coup de sang. Mais double album et gros label  signifient qu'il faudra se retourner et vraiment les juger sur ce qu'il en restera.




dimanche 6 mai 2012

Death Grips - The Money Store (2012)



Voir aussi la chronique de Exmilitary
Voir aussi l'article sur Zach Hill


Parutionavril 2012
LabelEpic
GenreHip-hop, expérimental
A écouterGet Got, The Fever (Aye Aye), I've Seen Footage
 ~
Qualitésintense/td>



En tout juste un an, depuis la parution de leur mixtape (entendre souvent par là : album novateur et excitant promis à un avenir confidentiel), Death Grips s’est précisé, s’est focalisé. Certains détails ont enfin filtré, et le trio hip-hop tendance apocalyptique (pensez Year Zero de Nine Inch Nails, 5 ans plus tard et en plus urbain) semble enfin destiné à devenir un vrai groupe. The Money Store devrait être correctement distribué, puisqu’ils n’ont pas attendu pour signer avec une major. On connaît enfin le nom du MC : Stefan Burnett. On savait déjà son phrasé terrible, c’est chose confirmée. Et Zach Hill, connu un jeu de batterie nerveux et technique au sein de Hella, divers autres projets ainsi que pour ses compositions en solo, reconnaît un attachement affectif à son nouveau groupe, le plus proche, selon ses dires, de ce qu’il a toujours désiré entendre. La perfection sonore atteinte avec cet album compressé, éclaté, commence par la façon dont est produite la batterie, comment elle se joue – avec les mains parfois – se transfigure.

Death Grips est un projet de paradoxes. Inspiré par les groupes à l’ignorance revendiquée des années 80, le hardcore insensé de Suicidal Tendencies, Fear ou Cro-Mag, ils se revendiquent pourtant futuristes, évoluent dans un espace dont l’existence est éphémère – à eux de la façonner de manière à ce qu’il soit durable. La dictature de l’instant, de l’action, qu’ils imposent en envahissant les speakers de sons oppressants autant qu’excitants ne les empêche pas d’avoir un impact intellectuel sur l’auditeur. « Nous voulons garder les choses là où elles s’arrêtent quotidiennement. » C’est un trio promis à élargir le public généralement amateur de hip-hop tout en faisant paraître l’un des albums les plus radicaux du genre, et capable de polariser comme un roman graphique de Franck Miller à l’intérieur même de sons système, parmi ses personnages. Leur pochette, noire et blanche, ne se prive pas d’affiche son influence au polar sexy et meurtrier qu’incarne mieux que quiconque Miller. Comme une femme violentée sortie de J’ai Tué Pour Elle, Death Grips semble avoir attendu le moment propice pour assassiner son bourreau. Le seul challenge que le trio propose à l’auditeur n’est pas intellectuel ; c’est de le faire accepter que le meilleur et le pire peuvent se côtoyer frénétiquement.

« Notre groupe et comme internet ! » s’exclame Hill lorsqu’on évoque cette propension de la toile à faire se rencontrer le mauvais goût et la bonne foi, les œuvres vides de sens et celles, puissantes, révélatrices d’un travers, que l’on envoie en mission, pour créer le buzz et observer jusqu’où elles peuvent se faire approprier. Internet, c’est l’ADN de Death Grips, leur raison d’être puisqu’il ont à leur tour tenté de voir jusqu’ou un vidéo de Stefan Burnett attaché sur le siège passager d’une voiture, en train de vomir les paroles de Guillotine, pourrait aller. « Sit in the dark and ponder how/I'm fit to make the bottom fall through the floor/And they all fall down, yah/It goes, it goes, it goes, it goes, YAH !”. Cette chanson restera sans doute le classique du hip-hop à l’heure ou il porte des pixels à l’insurrection avec un brio inégalé.

The Money Store est le parfait album du nerd 3.0, quand la vraie vie se tweete et les braquages sont un jeu sur Facebook. La précision du trio à créer cette atmosphère oppressante et tendue qui les caractérise tient à leur acuité, à leur procédé de palette. Leurs influences sont une partie de cette palette, des sons glanés sur internet une autre source. You Tube ou conversations enregistrées en douce fabriquent l’album.  L’album, ramassé, se développe dans un flow ascendant et culmine avec des morceaux comme I’ve Seen Footage. « Nous avons enregistré un de nos amis pendant qu’il avait cette conversation – il ne savait pas qu’il était enregistré. Il était complètement défoncé, et rabâchait ces trucs fous. Il parlait des structures de la lune. Et il me disait : "j’ai vu des vidéos ! J’ai vu des vidéos ! Et j’étais genre : ouais, d’accord. »



mercredi 18 mai 2011

Death Grips - Ex Military (2011)


Parution : avril 2011
Label : Autoproduit
Genre : Hip-Hop, indus
A écouter : Guillotine, Lord of the Game, Takyon (Death Yon)

7.50/10
Qualités : intense

Le mystérieux groupe hip-hop Death Grips s’est d’abord manifesté par des vidéos infernales, pleines de bruit (cette pollution sur les vieilles VHS) et de fureur, dans lesquelles un chanteur noir américain encore anonyme se servait de beats synthétiques et de tempos endiablés comme expectorant pour ses rimes vicieux. Ces clips, mis en ligne les uns après les autres, trois, quatre, cinq, font partie d’un stratagème sans détours, maintenant bien connu pour faire parler de soi. En témoignent le clan rap Odd Future, qui, depuis l’an dernier, ont posté une huitaine de ces « mixtapes » (des albums non officiellement entrés dans le circuit commercial). Pour Odd Future comme pour Death Grips, une initiative parfaite étant donné le caractère souterrain de cette musique, destiné à être nourrir immédiatement les « cafards » - de jeunes américains débordant  d’énergie  qui ne demandent à leur musique que de leur exploser à la figure. Death Grips est donc de cette espèce trash dès la première seconde, qui mise tout dans l’impact, mais, heureusement, garde des surprises pour la suite. Un son viral. Introduction (déjà culte ?) avec des paroles enregistrées de Charles Manson exultant, une escalade d’insanité verbale («I don’t want to take my time going to work ! I got a motorcycle, a sleeping bag and ten fifteen girls… Work for what ? Money ? I got all the money in the world ! I’m the king, man ! ») et débouchant sur une immense nappe électrique – drones, guitares – et avec de vrais morceaux de batterie dedans. Sur Beware, le flow décrit une conscience au bord de l’explosion, une main-mise sur le monde, une jouissance de l’instant.

« Tu es la bête que tu adores », répète t-il et la présence de Manson prend tout son sens. Vient Guillotine, envoyé à une cadence parfaite et ponctué par des coups de lame. La production est sèche, nette, coupante. Les beats vont se complexifier avec les trois morceaux suivants, qui révèlent toutes les capacités du trio. Si une composante du groupe est connue, c’est Zach Hill, batteur de Sacramento (Hella). Les ryhtmes sont irrésistibles ;  tribaux et étranges, toujours originaux, ils prouvent que le hip-hop put prendre des formes inattendues, à cheval entre les genres et de façon générale hors des schémas existants. Spread Eagle Cross the Block (psychotique), Lord of the Game (crâneur) et Takyon (Death Yon) (frontal) montrent un vrai talent à renouveler les rythmes intriqués, à demi synthétiques. La suite ne fera que conforter qu’il s’agit là d’un projet extrême et fascinant, un trio énigmatique de metteurs en scène talentueux. On se dit qu’après le Guns by Computer suggéré par Saul Williams comme remixe d'un instrumental de Nine Inch Nails il y a quelques années, c’est ce qu’on aurait aimé voir Williams accomplir. Il n’en avait pas le tempérament. Les manipulateurs sonores d’ici ont un sens du danger qui fait de Ex-Military un Year Zero hip-hop, r&b, ragga, chillwave, avec tout le pessimisme flippant que nécessite le rôle, et la même malignité sonore.

Death Grips embrasse avec bonheur tout un pan de culture underground de la fin des années 80, avec claviers cheap et production abrasive comme arme de destruction. La quantité de colère contenue dans ExMilitary a cependant été surestimée par les premiers auditeurs, même si cette illusion a servi astucieusement à polariser l’opinion (le genre de disque qu’une partie des gens vont typiquement détester) ; malgré quantité de paroles fielleuses, c’est plutôt son étrangeté bâtarde qui devrait demeurer sur le moyen terme. A défaut d’être des accoucheurs de conscience – mais pourquoi pas ? – ils enfantent d’une monstruosité agressive. Sa cohérence, sa construction raisonnée autour de thématiques de violence – les paroles sont encore introuvables sur internet et seulement assimilables en situation d’écoute (renforçant l’idée que ce disque se vit pour l’instant essentiellement dans le moment de son écoute plutôt qu’après), en font le genre d’album qu’il faut entendre une fois – chose d’autant plus facile puisqu’il est gratuit. Des hommages sous forme de samples de Pink Floyd (Astronomy Domine) ou Black Flag, nous avertissent ; ils sont prêts à faire feu de tout bois… A se consumer sans doute trop vite, et à être redécouverts dans quelques années une fois obtenu le recul nécessaire pour juger de leur véritable impact. A défaut d’impact, il restera une astuce rare et la propension à transformer des images désagréables en musique excitante.
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