O
attachant, intimiste
folk
Cet album est le troisième de la chanteuse et multi-instrumentiste Islandaise Olöf Arnalds, celui par lequel ses chansons deviennent plus directes que jamais, même si le fait de les chanter toutes en anglais pour la première fois est anecdotique en ce sens. C'est plutôt dû à la façon dont elles sont mises en musique, la simplicité de leurs mélodies et la sécheresse de leur enregistrement – sauf pour les quelques plantureuses sections de cordes. Ce qui compte, plus encore qu'auparavant, c'est la voix d'Arnalds, qui est sa propre créature organique au sein d'un bijou brodé inachevé, comme une fleur de tissu ouverte encore gauchement à la lumière.
Björk, qui a contribué au précédent album, disait cette voix appartenir aussi bien à une enfant qu'à une vieille femme. Les notes les plus hautes du timbre d'Arnalds sont les plus exotiques et uniques. Elle a sa façon de lanterner, de musarder, d'enrouler les syllabes autour du 'plink plonk' de sa guitare, pour reprendre l'expression péjorative d'un critique à l'égard du plus gros de la musique de cet album. Encore un qui a pris sa vivacité mutine, sa malice pour de l'inconstance, sa dévotion tranquille pour de l'insignifiance. Appréciation faussée par laquelle la plus enjouée Treat Her Kindly ne serait qu'une fronde inutile en comparaison avec la délicatesse céleste de Return Again, de son refrain frémissant, de sa section de cordes brève et magnifique. Quelque part au Moyen-Age, cette lamentation touchante pour un amant toujours absent, avec les violons en contrepoint, aurait ému un prince. Mais tous ces roucoulements, ces entortillages ne sont pas en dévotion au passé ; le regard clair, tourné vers le haut, Arnalds explore les profondeurs émotionnelles avec une fierté vivace. Des moment tels le multi-tracking de sa voix sur A Little Grim deviennent plus sensuels encore par leur présence au milieu d'un peu trop d'évidence. « I know it may sound familiar/I find myself in your place”.
Le naturel échevelé, en comparaison, d'Innundir Skinni, a fait place à une grande discipline, Olöf Arnalds assumant sa préférence pour le classicisme. Arnalds ne cherche pas tant à pénétrer qu'à effleurer. « Quelle jeune fille n'est pas passée par une phase où elle écoutait Joni Mitchell ? » s'interrogeait l'américaine Tift Merritt en interview. Arnalds a eu la sienne, à moins que ce soit son utilisation artisane d'une guitare 12 cordes qui donne cette impression. La palette d'instruments est large mais d'une discrétion maladive. Les vents, presque insoupçonnables sur Call it What You Want n'empêchent pas qu'il s'agisse d'un moment spécial dès la deuxième seconde, lorsque la voix d'Arnalds s'élève si haut, avec un frisson qui n'est pas sans rappeler l’afféterie de Joanna Newsom sur Have One On Me. «Easy/My man and me » chantait celle-ci, et cela reflète l'attitude ici : un album à prendre parfaitement détendu, afin que sa solennité comme son humeur joueuse fourbisse les flèches de la romance en provoquant le plus de satisfaction.