Parution : janvier 2012
Label : Discograph
Genre : Rock alternatif
A écouter : Tender, Brothers, Pursuit, Purple
O
Qualités : Doux-amer, entraînant
« Who gives a fuck about our stupid ideas 'cause we're stuck in
the sound »
Stuck' signifie 'bloqué'. Bloqué entre
deux statuts, celui de groupe prometteur et de nom qui compte, voire qui puisse
s'exporter à l'étranger.
C'est une situation habituelle pour un groupe français. Il
s'agit en l’occurrence d'un de ceux qui
attirent le mieux l'attention, plutôt avantagés par leur
capacité à enchaîner
concerts bourrés d'énergie,
portés par un public qui se prend volontiers au jeu de
la kermesse pop-grunge bon enfant. Shoegazing Kids, leur précédent (bon)
disque, a provoqué une nouvelle exigence pour ce
qui allait suivre. Pursuit désamorce brillamment cette
situation. C'est toujours un défi : un album
studio qui sera jugé sans pitié, la tête froide,
par opposition aux concerts où l'euphorie l'emporte, ou la
bonne humeur de l'instant ne fait pas s’embarrasser
d'un jugement musical. Qui plus est quand il s'agit du troisième.
En réalité, le
jugement ne peut porter seulement sur ce que Stuck in the Sound révolutionne
ou non avec leur musique. Il faut les apprécier
d'abord pour leur attitude, busy doing
music. « On va vous jouer encore une
chanson, car c'est notre métier », remarque
José Reis Fontao au moment de deuxième rappel et
avant d'entamer le 21ème chanson d'un concert à
l'Olympia. On les aime pour leur capacité à provoquer
le chaud et froid, à envoyer une grande claque
jusque quand on pensait que ça serait, finalement, la chanson
qui les ferait rentrer à la maison, et qu'on quitterait
avec l'impression d'une simple bonne volonté. Leur
travail paye : même s'il
n'ont pas quelqu'un de la trempe de Franck Black pour écrire les
chansons, elles sont étonnantes. Au final, on pourrait
n'assister qu'à tous les concerts, ne jurer que
par ceux-ci et ignorer les albums, ne plus acheter de disque et s'intéresser
seulement à un morceau téléchargé et remixé plusieurs
fois, Brother en l’occurrence. L'histoire de cette
pratique devient banale, et pourtant Pursuit mérite mieux : qu'on
s'y attache, en entier, pour son séquencement
sans faille d'assauts de tendresse et d'élans de
romance nuancés par des arrière-pensées.
« We all need to be loved when we
record the tracks. »
C'est l'album d'un groupe qui se surprend à écrire et
jouer des chansons à propos d'amour, et qui se
laisse aller au commentaire émotionnel, après avoir
fait le commentaire de sa propre expérience sur
Bandrupcy. Ce morceau pourrait être Stuck in The Sound se lançant à corps
perdu au début de sa carrière, mais
il se trouve qu'il est suffisamment tardif pour figurer sur leur troisième album,
et c'est avec celui-là qu'ils choisissent de suggérer une
crise créative bien naturelle pour eux. « We've been
gone for some years and now we're back again ! For the
worst, for the best, for tries and mistakes ». La
chanson Bandrupcy avait été envoyée en éclaireur
en amont de l'album, laissant leur fans dans l'appréhension.
Les 'essais et les erreurs' allaient t-il payer, les failles allaient t-elle
rendre le groupe plus fort ?
Dès le morceau d'ouverture,
Brother, la réponse est oui : un tube électro-rock
où la voix si distinctive et tendue de Fontao se
fait crâneuse autant que désespérée : «I cannot
top myself from loving her. » Dans le nouveau studio du
groupe construit par le groupe à Montreuil, les chansons sont
venues suffisamment wild and free
pour donner un patchwork plus que divertissant. Les morceaux de bravoure taillés pour la
scène, tels que Pursuit et Purple, entremêlent les
parties de guitare et se jouent toujours plus vite, tandis que des ballades
hybrides comme Tender, Who's the Guy ou Silent & Sweet se taillent la part
du lion, donnant, à travers les paroles chantées par
Fontao, l'image d'un groupe qui met la meilleure volonté à être aimé, et réussit.
Tender ou September, en particulier, sont des chansons plus risquées, car
c'est plus naturel pour eux de caracoler en profitant de l'exultation
d'instruments rodés par le jeu de scène (spéciale dédicace à la basse
de l'excellent Arno Bordas) que de chanter crescendo les mots 'In love' sans s'écraser. La
plus longue chanson, Criminal, est astucieusement placée au
centre l'album, le faisant culminer sur sa note la plus dramatique : « If falling
in love is criminal, let's get it together, we fuck it all. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire