Parution : février 2012
Label : Ici d'ailleurs
Genre : Folk
A écouter : Dust, Flesh and Bones
A écouter : Dust, Flesh and Bones
OO
Qualités : sombre, envoûtant
Matt Elliott s’est
maintenu dans une semi-pénombre tout au long de sa carrière juqu’à aujourd’hui,
poussant tranquillement les frontière de son écriture dans vers un idéal de
beauté et de désolation qui a des airs de logique inéluctable. Il est de ceux
que l’on croise par hasard, parce qu’ils ne sont pas très loin, parce qu’ils
ont la gentillesse de se produire à Toulouse pour 3 malheureux euros et de laisser le
secret d’un moment hypnotique parmi le public clairsemé. Découvrir Matt Elliott
est comme de se pointer dans l’arrière salle d’une brasserie de onzième
arrondissement et de tomber sur Josh T. Pearson en train de jouer Honeymoon
Great : Wish you Were Her, une litanie de plus de 13 minutes à la beauté terrassante,
la clairvoyance en plus. Vous aimez Bill Callahan ? Matt Elliott a une
voix grave, dans l’esprit de celle du parangon de Smog, même si il l’utilise ici
avec une parcimonie qui tient plus de l’illustration que de la chanson, comme
un autre instrument dans la fresque que constitue The Broken Man.
Les chansons
sur cet album extrême, en un sens, sont austères mais denses d’une lucidité
musicale, d’une inspiration qui leur donne un aspect grandiose. Démarrant souvent
sous le joug d’une guitare hispanisante au jeu complexe, elles s’affirment avec
un dessein extrêmement méticuleux et une sagesse à toute épreuve. Les suites qui
constituent la première face du vinyle démontrent le pouvoir et la
détermination de Matt Elliott à l’œuvre pour exprimer avec largesse les
sentiments de regret et de solitude dans leurs infinies variations.
Ce premier jet
culmine avec les dix minutes de Dust, Flesh and Bones, qui démarre comme une lamentation nue évoquant
Leonard Cohen et s’oriente en volutes autour d’une phrase répétée, conjurant
toute la conviction de d’Elliott envers sa propre sagesse affective. La chanson
décolle lentement de terre, prend un tour presque effrayant avec ses chœurs murés,
le son d’une cloche lointaine contribuant aussi à la sensation d’un vide
immense qui s’ouvre de plus en plus sous nos pieds – un aspect atmosphérique
qui fait de The Broken Man l’album le plus accompli de Matt Elliott à ce jour -,
tandis que la voix circonspecte d’Elliott demeure, malgré tout, un élément auquel
se raccrocher. Avec la confiance qu’il met à répéter « This is what it
feels to be alone », on est convaincu que la solitude le hante depuis des
années, et la chanson documente cette relation vaguement amusée avec elle. Le
résultat est d’une beauté, d’une évidence extraordinaires.
The Broken Man
s’enfance plus avant, construisant son plus long morceau sur deux
improvisations au piano semblant surgies des noirceurs d’une ancienne Vienne,
retranscrite et interprétées par Katia Labèque. Matt Elliott multiplie encore
la fascination produite par son œuvre, allant à rebours de la cohérence
habituelle pour nous obliger à trouver de nouvelles pistes de lecture, entre
acceptation d’un certain psychédélisme et reconstruction de quelque monument sonore
gothique oublié. Derrière une prestation stoïque et confiante se révèle la
force de chansons qui contiennent non seulement leur raison profonde, mais s’articulent
en un tableau d’une force étonnante.
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