Voir aussi la chronique en anglais à cette adresse : http://www.craveonline.com/entertainment/music/article/julie-christmas-the-bad-wife-116179
Parution : novembre 2010
Label : Rising Pulse
Genre : Metal, sludge
A écouter : July 31st, Bow, If you Go Away
°°
Qualités : intense, primal, sensible
Née en 1975, Julie Christmas est notamment connue des fidèles au label californien Neurot Recordings et de ses groupes de sludge ou de hardcore, inspirés pour beaucoup de l’ascension de Neurosis au rang de formation culte ces vingt dernières années. Les deux premiers disques de sa formation la moins pérenne, Made out Of Babies, y sont parus, avant que le groupe ne décide de changer pour un autre excellent label, The End, au moment de The Ruin en 2008. Le quatuor propose un métal assez lourd, primal et extrêmement intense, et cela est largement du à la prestation habitée et versatile de Christmas. « La voix est un instrument aussi essentiel que les autres. Encore plus, parfois », explique t-elle à Benjamin Rivière pour New Noise Magazine. Le plus marquant est ces hurlements qu’elle lâche, en porte-à-faux avec les harmonies, couvrant la musique rutilante d’une façon unique, plus honnête que provocante, contrôlée d’une certaine façon, vécue en réponse aux vibrations de la musique, et occasionnant des moments de bravoure scénique rares. Une colère animale motive Julie Christmas, que ses paroles poétiques rendent intérieure et beaucoup plus humaine. Une colère méthodique qui sévit depuis plusieurs années sans perdre une once de pertinence et de vérité. La chanteuse semble si proche de nous, tandis que, pétrifiés, nous sommes obligés de reconnaître que le même dépit, le même désir de puissance et la même frustration nous animent dans une société qui nous prive de moyens d’expression. I Just Destroyed the World, le titre le plus court du disque, est un acte de rébellion direct auquel nous sommes forcés de nous identifier.
La chanteuse semble si proche de nous, tandis que, pétrifiés, nous sommes obligés de reconnaître que le même dépit, le même désir de puissance et la même frustration nous animent
Label : Rising Pulse
Genre : Metal, sludge
A écouter : July 31st, Bow, If you Go Away
°°
Qualités : intense, primal, sensible
Née en 1975, Julie Christmas est notamment connue des fidèles au label californien Neurot Recordings et de ses groupes de sludge ou de hardcore, inspirés pour beaucoup de l’ascension de Neurosis au rang de formation culte ces vingt dernières années. Les deux premiers disques de sa formation la moins pérenne, Made out Of Babies, y sont parus, avant que le groupe ne décide de changer pour un autre excellent label, The End, au moment de The Ruin en 2008. Le quatuor propose un métal assez lourd, primal et extrêmement intense, et cela est largement du à la prestation habitée et versatile de Christmas. « La voix est un instrument aussi essentiel que les autres. Encore plus, parfois », explique t-elle à Benjamin Rivière pour New Noise Magazine. Le plus marquant est ces hurlements qu’elle lâche, en porte-à-faux avec les harmonies, couvrant la musique rutilante d’une façon unique, plus honnête que provocante, contrôlée d’une certaine façon, vécue en réponse aux vibrations de la musique, et occasionnant des moments de bravoure scénique rares. Une colère animale motive Julie Christmas, que ses paroles poétiques rendent intérieure et beaucoup plus humaine. Une colère méthodique qui sévit depuis plusieurs années sans perdre une once de pertinence et de vérité. La chanteuse semble si proche de nous, tandis que, pétrifiés, nous sommes obligés de reconnaître que le même dépit, le même désir de puissance et la même frustration nous animent dans une société qui nous prive de moyens d’expression. I Just Destroyed the World, le titre le plus court du disque, est un acte de rébellion direct auquel nous sommes forcés de nous identifier.
La chanteuse semble si proche de nous, tandis que, pétrifiés, nous sommes obligés de reconnaître que le même dépit, le même désir de puissance et la même frustration nous animent
Dès lors qu’on est séduit par ces manifestations de possédée, la facette plus sensible de son œuvre ne peut que nous réjouir. Sur The Bad Wife, elle fait cohabiter un large registre d’expressions, le plus surprenant pour elle étant sans doute de l’entendre reprendre Jacques Brel (à la manière de Scott Walker). « J’avais envie de changer de registre. […] Je souhaitais donc exprimer d’autres types d’émotions, tout aussi forts. » Le texte peut être affilié à un long poème traitant de la perte d’un être cher ; pas encore complètement parti, mais déjà en route. Le foyer devient ainsi un lieu d’angoisse. Cette chanson traduit le besoin de Julie Christmas d’être entourée, dans sa vie comme dans son art, peut-être de façon à diluer un peu sa remarquable exigence vis-à-vis d’elle-même. C’est, après tout, une artiste timide hors de la scène, et The Bad Wife, qui lui a permis de se révéler sans peintures de guerre, est très important pour elle. « Le projet porte mon nom, mais je n’ai absolument rien fait seule. J’ai travaillé sur toutes les chansons avec John LaMacchia (Candiria) et Andrew Schneider (qui produit Cave In, Unsane). Ensuite, j’ai fait appel à d’autres musiciens qui ont apporté leur pierre à l’édifice. La plupart d’entre eux ont eu le champ libre ». Ce n’est absolument pas un disque de repli, mais il lui permet au contraire de s’exposer davantage, presque complexée. « J’essaie de mieux que je peux de me sentir belle mais au final, j’ai toujours l’impression de ressembler à une folle introvertie avec une bosse dans le dos. » Sa fragilité évoque parfois Beth Gibbons (Portishead), ce qui n’empêche pas des finals grandioses (Six Pairs of Feet and One Pair of Legs, A Wigmaker’s Widow, When Everything is Green).
La musique fait aussi beaucoup pour rendre The Bad Wife attrayant. Elle est à la source de sa rudesse, de son étrangeté, de sa beauté et de sa poésie. « Je ne passe pas beaucoup de temps sur mes textes, je mise davantage sur les sons que sur les mots pour faire passer des émotions. » Tandis que les grosses mécaniques, époustouflantes, sont toujours à l’œuvre, créant un lien évident avec Made Out of Babies ou Battle of Mice – July 31st, Bow – d’autres moments apportent des sensations inédites dans un imaginaire déjà bien rempli de projets iconoclastes. Le début de Six Pairs of Feet and One Pair of Legs ressemble volontairement à une musique de film d’horreur, tandis qu’A Wigmaker’s Widow, avec son côté cabaret, rappelle les Dresden Dolls. Comme toutes les meilleures expériences, il y a plusieurs dimensions dans The Bad Wife, qui reste pourtant une œuvre cohérente forte et mémorable, parfaitement séquencée. La pochette du disque (la version CD, différente) représente en apparence une sorte d’énorme gâteau dans lequel on peut entrer ; avant qu’on ne remarque que de vraies dents et de vrais yeux ont été ajoutés par l’artiste taxidermiste. « C’est un gâteau qui te dévore ». The Bad Wife donne l’impression parfois d’avoir été piégé, charmé ; une fois assimilé, c’est un disque qui nous concerne bien au-delà de l’agréable apparence de Christmas. C’est la différence entre un livre d’images qu’on ne fait que feuilleter, et entrer dans l’histoire, un univers subtilement différent du nôtre. Un processus qui la fascine. « J’ai toujours été impressionnée par le vice qu’on peut trouver dans les contes de fées, pourtant censés s’adresser aux enfants. » La superbe vidéo pour Bow la montre dans l’un de ces mondes ; à la fois prisonnière domestique et fantasme suscité par l’imaginaire.
A noter, deux autres morceaux sont également téléchargeables en ligne sur le site de Coextinction Recordings.
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