Parution : 2003
Label : Drag City
Genre : Folk, Rock
A écouter : Truth Serum, Our Anniversary, Butterflies Drown in Wine
7.75/10
Qualités : lucide, romantique, Doux-amer
Supper est l’un des disques les plus accessibles dans la discographie de Smog, mais non moins ambitieux que ses prédécesseurs ; Callahan s’y révèle en effet en confiance, repoussant un peu plus la paranoïa domestique affiliée à son patronyme. Il y est aussi moins percutant, moins austère qu’à l’habitude. En compagnie de la chanteuse américaine Sarabeth Tucek sur plusieurs chansons, il prouve que ses textes peuvent prendre un sens et être partagés, comme dans cet exquis jeu de question/réponse sur Truth Serum, une chanson en chantier depuis longtemps… mais qui d’une certaine façon ne pouvait voir le jour que lorsque Smog deviendrait plus humain. « Honey i Love you and that’s all you need to know/Well, then what is love/ Love is an object kept in an empty box/How can something be in an empty box/Well well give me another shot/Of that truth serum” » (« Mon cœur, je t’aime et c’est tout ce que tu dois savoir/Ah oui, alors qu’est ce que l’amour/L’amour est un objet gardé dans une boîte vide/Comment quelque chose peut t-il être dans une boîte vide/Eh bien, donne-moi une autre rasade/De ce sérum de vérité. » Le chanteur a toujours été partisan des faux semblants, des jeux de rôles. Sa nouvelle illusion se rapproche avec plus de danger et d’adresse que jamais de la réalité. « Is death really the end /Honey I love you and that's all you need to know/Well then, what is life/Well thats a good song/Without you by my side” (La mort est t-elle vraiment la fin/Chéri je t’aime et c’est tout ce que tu as besoin de savoir/Bien, alors qu’est-ce que la vie/Eh bien c’est une bonne chanson/sans toi à mes côtés. »
Son affection pour son personnage se mélange à sa propre expérience ; il reconnaît que toute chanson est un microcosme, une « bathysphère » dans laquelle vivre et faire triompher l’égo. Le sérum de vérité ne lui fait pas seulement parler plus que de raison, mais il fait apparaître la vérité là où elle existe. « There’s no truth in you/There’s no truth in me/The truth is between» (“Il n’y a pas de vérité en toi/Il n’y a pas de vérité en moi/La vérité est entre nous”). Callahan est là au cœur de quelque chose de régénérant, de sain ; s’il cherche à les maîtriser, les émotions le dépassent pour avoir sur lui une influence finalement positive. Son environnement lui permet de devenir plus lisible, alors qu’il servait autrefois à son opacité. Il a toujours l’ancienne fierté de se façonner une réalité pour lui-même, en excluant tous les autres ; « Forget everything I'm told/In one ear and out the other » (« J’oublie tout ce qu’on me dit/Ca entre par une oreille et ça ressort par l’autre »). Le personnage féminin de Truth Serum est sans doute le plus intéressant à avoir jamais mis les pieds dans une chanson de Smog, là ou Callahan, pour des raisons de vengeance évidentes, n’hésitait pas auparavant à montrer de l’hostilité.
Son respect, il le porte à ceux qui se défendent dans une forme animale, qui revendiquent leur ambivalence. « If you're losing your wings/Feather by feather/Love the way they whip away/On the wind » (« Si tu perds tes ailes /plume par plume/j’aime la façon dont elles battent/dans le vent ») Dans ses périodes les plus sombres, il révérait ceux qui assument leur égoïsme et leur cruauté : aujourd’hui il récuse toute influence néfaste. « And I can’t be held responsible for the thing I say/For I am just a vessel in vain” (“Je ne peux pas être tenu responsable pour les choses que j’ai dites/je suis sans intention »). Vessel in Vain participe au climat de philosophie contemplative du disque. « Mes idéaux m’ont gagné à la course » conclut t-il dans cette chanson. Son environnement a pu le manipuler ; il le réinvestit en le comprenant mieux. Les illusions, il les a dissipées en lui-même.
Il joue de sa pudeur et des limites de la fiction, dans des moments où l’engeance qui l’habite prend le dessus. Sur Our Anniversary, tandis que la batterie meurt lentement, sa dualité se révèle et transforme une virée romantique en célébration sauvage. « While the battery dies/Clipping the wings of your morning flight/The night will end/In some form of excess” (“Tandis que la batterie rend l’âme/Coupant les ailes de ton vol matinal/La nuit va se terminer/dans quelque forme d’excès.”) Transcendant cet aspect d’animalité incontrôlable, Callahan a décidé que Smog serait désormais un outil de séduction, faisant de lui une sorte de bête fabuleuse. «I never use doors no mores/I never use stairs just trees/And I hear their voices” (“Je n’utilise plus les portes/Je n’utilise plus les escaliersseulement les arbres/et j’entends leur voix. »), sur Ambition, l’un des nombreux sommets du disque. Il y a des chansons qui demandaient d’être interprétées depuis longtemps ; d’autres jaillissent dans la ferveur du studio, sans que quiconque ait été prévenu. Callahan avoue essayer de toujours laisser la place à de telles chansons spontanées sur ses disques. C’est le cas de Driving, construit autour d’une unique phrase. « Tu peux le croire ou pas, mais quand ça a été fait, c’était ce que je voulais. C’était exactement ça, mais je n’aurais jamais pu transformer, en faire des mots sur du papier"
merci,toi.
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