OO
lourd, soigné, puissant
metal progressif, doom
Le fait qu'il s'agit d'un groupe grec n'entre pas tout de suite en ligne de mire à l'écoute d'Hegaiamas : a song for Freedom. Le titre lui-même ressemble plus à un néologisme typique du métal progressif, genre prompt à encapsuler dans de tels mots de fabuleux concepts, comme ici la liberté. Leur précédent album, Orvam: A Song for Home, les avait amenés à tourner en Europe et aux États-Unis, avec Symphony X et Candlemass. En comparaison, le nouveau venu est bien plus optimiste, même s'il part d'un constat anxiogène.
Ce qu'on apprécie d'entrée de jeu, c'est l'extraordinaire travail abattu non du point de vue musical – cela viendra juste après – mais pour que les chansons soient extrêmement claires, articulées avec une précision redoutable par Jon V., qui a d'ailleurs une voix parfaite pour occuper le créneau à priori peu envié entre In Flames et Dream Theater. Hegaiamas est l'exemple de comment le message d'un groupe et la façon de le délivrer différencie un disque sans grand intérêt d'un album remarquable. Il ne suffit pas d'être intense, de susciter de l'émotion ou de savoir jouer à la perfection : il faut aussi que les chansons entrent en résonance avec l'époque.
La clarté du chant et du message n'empêche pas une certaine complexité d'entrer en compte. On comprend qu'il s'agit de décrier l'être humain capable de laisser des centaines de migrants à leur perte, ce n'est jamais très explicite mais plutôt exprimé comme une situation étant le produit de paradoxes. « We've been trying to live in peace/all beyond this loom horizon » chante Jon V. avec exaltation sur Rememory. La présence d'une chanteuse sur plusieurs morceaux est bien valorisée.
La colère et le désespoir sont limpides. A un message par ailleurs assez complexe est associée une musique parfaitement produite, où chaque tournant de chaque chanson, et ils sont nombreux quand la durée habituelle dépasse les six minutes, est parfaitement intégré et lisible après deux ou trois écoutes. C'est alors que l'on peu vraiment se fier à l'émotion que dégagent les phrases et les mots utilisés par Jon V. comme des détonateurs sous-marins. Puis, à un certain point, cette colère rentrée devient un chant transcendant de toute puissance et de paix qui n'est pas sans rappeler les meilleurs moments de Devin Townsend, par exemple au moment de Terria (2003). C'est une influence pourvoyeuse du metal progressif le plus contemporain, que Need a su réutiliser pour parvenir à leurs fins : produire une œuvre qui les accompagne vers un état de conscience supérieur, et combattre avec des sentiments positifs la culpabilité face à une situation dont ils ne sont que des rouages : forcés de regarder des enfant, des femmes et des hommes se noyer en mer.
En définitive, la volonté de Need de trouver leur propre voie en marge d'une société qui les piège en les obligeant à devenir complices de ses crimes, cette propension à partir à l'aventure à l'intérieur de leur propres sentiments comme s'ils exploraient la carte de l'univers, à s'insurger en laissant leur imagination jouer une partition sauvage, est très représentative du genre de metal progressif. Ils recherchent une échappatoire, ils se prennent à rêver de réalités parallèles, à portée de leur volonté artistique. S'ils ne peuvent effectivement se détacher de leur réalité quotidienne, ils y ont cru et cela se ressent sur cet album. Le concept de liberté est aussi sérieux que fragile, mais grâce à sa technicité, Need fait rapidement oublier l'ampleur de la tâche qu'il s'est fixée et nous en donne plus qu'on aurait pu l'espérer.
Alltribe augmente encore la technicité de Rememory, tandis que Terianthrope et Riverthane parviennent encore à dégager des mélodies gracieuses de leur lourdeur asphyxiante. Des chants de baleines ouvrent Tilikum qui incorpore une touche de doom metal et pousse la prise de conscience à son niveau ultime avant la section finale. La nature humaine est questionnée, notre dépendance les uns aux autres, et comment retourner à son avantage les forces qui nous oppressent. Le solo de guitare et le chant féminin renvoient à Devin Townsend et à sa complicité avec Anneke Van Giersbergen. A quarante minutes du début, ils délivrent alors leur pièce la plus massive, et à ce point de l'album, c'est comme si nous étions en pleine inception ; se rendant confusément aux impressions des chansons passées, comme à autant de strates de rêves, avant d’attaquer le plus révélateur et périlleux d'entre eux.
Le fait qu'il s'agit d'un groupe grec n'entre pas tout de suite en ligne de mire à l'écoute d'Hegaiamas : a song for Freedom. Le titre lui-même ressemble plus à un néologisme typique du métal progressif, genre prompt à encapsuler dans de tels mots de fabuleux concepts, comme ici la liberté. Leur précédent album, Orvam: A Song for Home, les avait amenés à tourner en Europe et aux États-Unis, avec Symphony X et Candlemass. En comparaison, le nouveau venu est bien plus optimiste, même s'il part d'un constat anxiogène.
Ce qu'on apprécie d'entrée de jeu, c'est l'extraordinaire travail abattu non du point de vue musical – cela viendra juste après – mais pour que les chansons soient extrêmement claires, articulées avec une précision redoutable par Jon V., qui a d'ailleurs une voix parfaite pour occuper le créneau à priori peu envié entre In Flames et Dream Theater. Hegaiamas est l'exemple de comment le message d'un groupe et la façon de le délivrer différencie un disque sans grand intérêt d'un album remarquable. Il ne suffit pas d'être intense, de susciter de l'émotion ou de savoir jouer à la perfection : il faut aussi que les chansons entrent en résonance avec l'époque.
La clarté du chant et du message n'empêche pas une certaine complexité d'entrer en compte. On comprend qu'il s'agit de décrier l'être humain capable de laisser des centaines de migrants à leur perte, ce n'est jamais très explicite mais plutôt exprimé comme une situation étant le produit de paradoxes. « We've been trying to live in peace/all beyond this loom horizon » chante Jon V. avec exaltation sur Rememory. La présence d'une chanteuse sur plusieurs morceaux est bien valorisée.
La colère et le désespoir sont limpides. A un message par ailleurs assez complexe est associée une musique parfaitement produite, où chaque tournant de chaque chanson, et ils sont nombreux quand la durée habituelle dépasse les six minutes, est parfaitement intégré et lisible après deux ou trois écoutes. C'est alors que l'on peu vraiment se fier à l'émotion que dégagent les phrases et les mots utilisés par Jon V. comme des détonateurs sous-marins. Puis, à un certain point, cette colère rentrée devient un chant transcendant de toute puissance et de paix qui n'est pas sans rappeler les meilleurs moments de Devin Townsend, par exemple au moment de Terria (2003). C'est une influence pourvoyeuse du metal progressif le plus contemporain, que Need a su réutiliser pour parvenir à leurs fins : produire une œuvre qui les accompagne vers un état de conscience supérieur, et combattre avec des sentiments positifs la culpabilité face à une situation dont ils ne sont que des rouages : forcés de regarder des enfant, des femmes et des hommes se noyer en mer.
En définitive, la volonté de Need de trouver leur propre voie en marge d'une société qui les piège en les obligeant à devenir complices de ses crimes, cette propension à partir à l'aventure à l'intérieur de leur propres sentiments comme s'ils exploraient la carte de l'univers, à s'insurger en laissant leur imagination jouer une partition sauvage, est très représentative du genre de metal progressif. Ils recherchent une échappatoire, ils se prennent à rêver de réalités parallèles, à portée de leur volonté artistique. S'ils ne peuvent effectivement se détacher de leur réalité quotidienne, ils y ont cru et cela se ressent sur cet album. Le concept de liberté est aussi sérieux que fragile, mais grâce à sa technicité, Need fait rapidement oublier l'ampleur de la tâche qu'il s'est fixée et nous en donne plus qu'on aurait pu l'espérer.
Alltribe augmente encore la technicité de Rememory, tandis que Terianthrope et Riverthane parviennent encore à dégager des mélodies gracieuses de leur lourdeur asphyxiante. Des chants de baleines ouvrent Tilikum qui incorpore une touche de doom metal et pousse la prise de conscience à son niveau ultime avant la section finale. La nature humaine est questionnée, notre dépendance les uns aux autres, et comment retourner à son avantage les forces qui nous oppressent. Le solo de guitare et le chant féminin renvoient à Devin Townsend et à sa complicité avec Anneke Van Giersbergen. A quarante minutes du début, ils délivrent alors leur pièce la plus massive, et à ce point de l'album, c'est comme si nous étions en pleine inception ; se rendant confusément aux impressions des chansons passées, comme à autant de strates de rêves, avant d’attaquer le plus révélateur et périlleux d'entre eux.
https://needband.bandcamp.com/
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire