listen while you read !
OO
lucide, romantique, élégant
folk, folk-rock
Sur
Dream River, Bill Callahan continue à étudier la condition de
l'homme occidental, qui sans intervention divine en vue (depuis que
dieu a été 'mis de côté' sur la chanson Faith/Void) doit
continuer à mener son existence. Mais comme il existe toujours une
évolution quasi-naturelle dans l'existentialisme du grand songwriter
américain, il s'attache avec ce nouvel album à décrire les vies
des hommes en général, du point de vue romantique, même si cela
doit le mener à un peu de naîveté.
Apocalypse
donnait en perpective un portrait de l'artiste lui même, face à la
quantité de ses chansons, ses perceptions déjà détaillées et
enregistrées au cours d'un riche passé musical – il a désormais
plus de 20 ans de carrière. Plus que jamais, chacune des sept
chansons de l'album était faite pour marquer un temps, une saison,
ou un jour de la semaine. Le lundi, avec Drover, il partait se
confronter, avec une intensité que le peintre Paul Ryan avait bien
imaginée pour son tableau Apocalypse at Mule Eears Peak, la
'montagne aux oreilles de mule', aux réalités du Dehors, remarquant
que cela le faisait redevenir complètement lucide et pertinent.
“J'ai remis ma montre à l'heure du clocher/il était grand
temps !” C'est comme si c'était la première fois que Callahan
trouvait autant de sens dans des mots simples et des comportements de
plus en plus instinctifs. Il préparait le terrain pour son album le
plus cohérent. Le jeudi, sur Universal Applicant, il démontrait
enfin une bonne fois pour toutes qu'il ne souhaitait être que
lui-même, fusionner tout les personnages qu'il avait été
auparavant. Kidnappé, soumis au jugement des animaux sauvages, il
tient tête et donne encore une leçon d'affirmation de soi. Le
samedi, Riding For the Feeling faisait intelligemment miroiter
l'effet de sa propre oeuvre passée, aussi disparate soi-t-elle, lui
donnant sa limpidité à travers un sacre de printemps qui en faisait
son 'apocalypse.' Une façon de l'assimiler, en même temps que lui,
à la nature envirronnante.
Les
thèmes d'Apocalypse auraient pu faire l'objet de toute l'oeuvre d'un
artiste, mais Callahan a trouvé le moyen d'aller plus loin. Et comme
il s'agit de musique, il a d'abord humé l'avenir et cet album, Dream
River, de ce point de vue. Il le voyait comme un retour à plus
d'étoffe sonore après avoir qualifié Apocalypse d'album
'squelette'. Ce qui dans le jargon de Callahan signifie des chansons
telles que la belle dérive au piano One Fine Morning, et qui pour le
folk en général est un adjectif de très bon augure. Les squelettes
sont toujours faits pour servir de treilles à de nouveaux fruits.
Mais de toute façon, Dream River ne s'étoffe pas de façon
conventionnelle. Plus que jamais maintenant que le groupe – le
guitariste Matt Kinsey en tête - sait exactement comment
expérimenter, Callahan y peint les sons.
Sometimes
i Wish we Were an Eagle profitait de beaux arrangements de cordes,
qui, avec un jeu de guitare sous-estimé pleinement mis en valeur et
la voix triomphant plus que jamais dans sa gravité et dans sa
nuance, aurait du élargir le public de Bill Callahan. Dans un monde
ou les thèmes de communion avec la nature, les mots simples évoquant
la sensualité ou le vol d'un oiseau et l'humour batifolant auraient
eu plus de poids que les grandes productions filmiques érigeant les
catastrophes planétaires comme seule issue possible, cet album
aurait du être le produit culturel de l'année. Dans la société,
Bill Callahan sait se maintenir à l'écart de ce qui semble
artificiel et qui n'est pas essentiel, comme il le fait des termes
trop difficiles. Il a le bon goût de remplacer la trivialité
populaire par l'humour, par la candeur forcée et par des mots qui
réduisent l'action à une seule scène. Dans Summer Painter, sans
doute la chanson la plus en phase avec la fougue électrique de
Kinsey, un peintre (la peinture est, encore plus que le cinéma,
l'art qui inspire Callahan à ce point de sa carrière) passe l'été
à former les lettres des noms de bateaux, tandis que 'les castors
construisent des barrages autour de moi'. D'une façon absurde, quand
l'automne vient et que le peintre doit s'arrêter, il réalise qu'il
ne peut vraiment faire autre chose, comme les castors et leurs
barrages ; et la superstition locale voudra qu'on le soupçonne
d'être à l'origine de l'ouragan qui se déclenche dès le moment où
il lâche son pinceau, car l'ordre des choses était qu'il continue à
rester en osmose avec l'eau qui l'environne. Callahan compare les
habitudes des hommes à des données naturelles, et la société ne
fonctionne qu'en symbiose avec son environnement. Il a été comparé
pour cela à l'écrivain Raymond Carver. à suivre
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire